25 août 1944 : les pompiers hissent à nouveau le drapeau français sur la tour Eiffel
Focus
Mise à jour le 07/08/2024
Sommaire
En juin 1940 les soldats allemands contraignent un pompier français à retirer le drapeau tricolore qui flotte au sommet de la tour Eiffel. Le 25 août 1944, le capitaine Sarniguet accompagné de cinq autres pompiers de Paris hissent à nouveau les couleurs, dans un Paris libéré. C'est l'image symbolique de toute une série d'actions menées par les pompiers de Paris, pendant l'occupation, puis lors de la libération de Paris, que l'on vous raconte ici.
« À 11h00, le "commando" quitte la caserne à bord d’un fourgon mixte muni d’un drapeau confectionné à l’aide de draps cousus par des femmes de pompiers et teinté en bleu-blanc-rouge, peut-on lire sur le site des sapeurs-pompiers de Paris. Arrivés au pied de la tour, les sapeurs-pompiers entament l’ascension des escaliers sous les tirs des allemands barricadés à l’École militaire. Arrivés sur la troisième plateforme, le capitaine Sarniguet commande : "Envoyez les couleurs !" C’est le sergent Duriaux qui tire sur la drisse, afin de monter le drapeau en haut du mât. Il est 12h50 lorsque les trois couleurs flottent à nouveau sur la capitale. » Au même moment, un autre détachement de pompiers de Paris, sous le commandement du capitaine Bernard, déploie sous la balustrade de l’Arc de Triomphe un immense drapeau français de 22 mètres.
Ces images fortes hautement symboliques ne sont qu'une partie du rôle important des pompiers de Paris tout au long du conflit et lors de la Libération.
Organisation et activité
De 1940 à 1944, le régiment de sapeurs-pompiers de Paris poursuit ses activités habituelles, avec un effectif renforcé. Unité militaire placée sous l’autorité du préfet de police de Paris, mais sous régime d’occupation par l’armée allemande, le régiment est placé sous le contrôle étroit de la Feuerschutzpolizei (police de protection incendie allemande), un service spécialisé du commandement de l’armée d’occupation, qui surveille de près ses opérations. Pour opérer, le corps est servi par un effectif de 5 390 pompiers (3 396 d’active, et 1 894 réservistes rappelés pour la durée des hostilités).
L’activité du régiment, importante durant toute la période des hostilités, devient intense à partir du printemps 1943. En effet, du 4 avril 1943 au 8 septembre 1944, des vagues de bombardements de plus en plus puissantes frappent la région parisienne, occasionnant des destructions importantes et de nombreuses victimes. De plus, quatre détachements sont envoyés à Rouen, en se relayant, pour combattre les nombreux incendies dus à plusieurs vagues de bombardements intensifs du 31 mai au 5 juin 1944. En tout, ce sont plus de 33 vagues de bombardements qui mobilisent le régiment entre 1943 et 1944.
Pompiers résistants sous l'organisation SP
Une importante activité de résistance se développe parmi les pompiers de Paris au cours des quatre années d’occupation. Plusieurs pompiers agissent à titre individuel dès 1940, puis forment un groupe sous l’égide du mouvement de résistance Organisation civile et militaire (OCM) à partir de 1942. De nombreux actes de résistance entraînent des arrestations ou des déportations. Le 14 janvier 1944, des arrestations, notamment celle du capitaine Gros et du lieutenant Gaunay, entraînent la chute du réseau OCM des Pompiers de Paris. Une organisation spécifique, Sécurité parisienne (SP), animée par le capitaine Frédéric Curie, qui mène des activités de résistance depuis 1940, se met alors en place. Les initiales de ce réseau, SP, font écho au diminutif de sapeur-pompier et à la devise du corps : « Sauver ou périr ».
498 pompiers recrutés clandestinement
Les semaines qui suivent le débarquement du 6 juin 1944 présagent de l’imminence de la libération du territoire. Les responsables de la SP vont cristalliser l’organisation en juin-juillet 1944 autour d’un noyau actif comptant six officiers et en recrutant clandestinement 498 sapeurs-pompiers disséminés dans les compagnies d’incendie et ayant appartenu pour certains au réseau régimentaire du mouvement OCM.
Six compagnies clandestines de combat sont ainsi formées, prêtes à intervenir dans les activités de résistance. Parallèlement, les soldats du feu doivent poursuivre leurs missions traditionnelles. Il faut lutter contre les incendies, secourir les populations et surtout garder la liberté de circulation tolérée par les Allemands, ce qui permet de poursuivre une précieuse activité de renseignement au profit de la résistance et des alliés. C’est pourquoi les responsables de Sécurité parisienne posent le principe suivant : les pompiers des compagnies clandestines d’intervention doivent combattre en civil aux côtés des FFI. Ceux qui assurent les missions traditionnelles restent en uniforme.
Fin juillet 1944, les armées alliées, débarquées en Normandie le 6 juin, percent le front allemand et se dirigent à vive allure vers Paris. La Wehrmacht décide de commencer l’évacuation de Paris de ses services et de ne laisser que des troupes de défense, placées le 9 août sous le commandement du général Von Choltitz. À partir du 10 août 1944, les cheminots sont en grève. Le métro s’arrête le 15 août. L’électricité n’est distribuée qu’une heure par jour. Le ravitaillement devient difficile. Le même jour, la police parisienne se met en grève. Le 17 août, Charles Luizet, nouveau préfet de police nommé par le gouvernement du général de Gaulle, arrive clandestinement à Paris pour prendre ses fonctions.
Chronologie d'une libération
Dans la mesure où un piquet de garde du régiment se trouve en permanence à la préfecture, les sapeurs-pompiers sont présents dès les premières heures de l’insurrection. Le 21 août, deux sections spéciales comptant quarante-quatre hommes en tenue civile se rendent sur l’île de la Cité pour renforcer les effectifs déjà présents.
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Le 20 et 21 août, des distributions dans les centres de secours (pour une redistribution à la population) du premier bulletin d’information de la France libérée, L’Information officielle des armées de la République, sont effectuées en tenue civile par des sapeurs-pompiers des sections spéciales.
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Le 21 août, aux postes de commandement FFI des 5e et 6e arrondissements, des sapeurs-pompiers des sections spéciales donnent des instructions sur le maniement des mines antichars et leur désamorçage par des moyens de fortune.
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Dans la nuit du 22 au 23 août, des sapeurs-pompiers du groupement de résistance aident à l’aménagement et à la construction de barricades dans les 5e et 15e arrondissements ainsi qu’à la pose de mines antichars.
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Le 24 août, un groupe de sapeurs-pompiers armés investit avec l’aide d'éléments extérieurs la caserne Fontenoy, dépôt de vivres allemands.
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Le 25 août, une section spéciale armée participe à l’assaut de l’École militaire. Le soir, à l’Hôtel de Ville, des sapeurs-pompiers assurent le service d’ordre lors du passage du général de Gaulle et le 26 août au cours de sa descente des Champs-Élysées.
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Les 25 août et 26 août, des sapeurs-pompiers visitent les centraux téléphoniques souterrains du Sénat pour déceler et désamorcer des charges explosives. La recherche de tireurs isolés et effectués les 25 et 26 août par plusieurs sections spéciales du groupement Sécurité parisienne. Six pompiers trouvent la mort au cours de ces opérations. Six tireurs dont quatre allemands sont arrêtés aux numéros 116, 136 et 140 de l’avenue des Champs-Élysées.
11 tués et 15 blessés, l'hommage du général de Gaulle
Au soir du 26 août flottent sous l’ Arc de Triomphe et au sommet de la tour Eiffel les deux drapeaux tricolores, déployés la veille par les pompiers de Paris.
Au cours de la Libération, onze sapeurs-pompiers perdent la vie et quinze sont blessés.
Le général de Gaulle rendra un hommage appuyé à l'action des sapeurs-pompiers, à Paris, le 14 novembre 1944 : « Paris, libéré de l’ennemi, sait ce qu’il doit au régiment de sapeurs-pompiers. À tant de dévouement prodigué tout au long des années par le régiment, la guerre a ajouté les épreuves dignement subies pendant l’ odieuse invasion et l’honneur des combats victorieux de la Libération »
Pour en savoir plus sur l'histoire des sapeurs-pompiers de Paris
Emmanuel Ranvoisy, officier de réserve à la brigade de sapeurs-pompiers de Paris et Didier Sapaut, ancien élève de l’École normale supérieure, agrégé d’histoire, deux éminents spécialistes de l’histoire et du patrimoine des sapeurs-pompiers de Paris, ont proposé d’écrire le récit de l’implication des hommes du régiment dans les combats d’août 1944 et leurs actions pendant l'occupation.
Ce travail a été entrepris à partir des documents d’origine conservés dans les archives de la brigade : rapports d’intervention, comptes rendus, journaux de marche des compagnies, photographies.
Tel est l’objet des livrets que vous pouvez télécharger ici pour connaître en détail cette histoire.
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