Agnès Jaoui est comme dans son salon au Théâtre de la Concorde
Rencontre
Mise à jour le 26/02/2025

Comédienne, scénariste, réalisatrice, autrice, musicienne… On ne compte plus les multiples casquettes d’Agnès Jaoui. Les 28 et 29 mars, c’est en tant que chanteuse qu’elle donne rendez-vous au Théâtre de la Concorde, avec deux concerts inédits. Avant de nous embarquer dans son univers coloré et plein de poésie, l’artiste parisienne s’est livrée à quelques confidences.
Que vous inspire le Théâtre de la Concorde (8e), dont la scène flambant neuve vous attend les 28 et 29 mars ?
C’est drôle, parce que c’est l’un des lieux qui a vu mes premiers pas sur scène avec les auditions de fin d’année du Cours Florent. Plus tard, j’y ai chanté avec Camané, un immense fadiste portugais. C’est un très beau souvenir ! Le nouveau souffle insufflé à ce théâtre, niché au milieu des jardins, est complètement incroyable. C’est un endroit assez détonnant !
Vous y chanterez votre dernier album, interprété intégralement en français. En quoi est-ce différent de vous livrer dans cette langue ?
C’est une langue avec laquelle je me sens beaucoup plus mise à nu, dans une sorte de rapport intime avec le public. Jusqu’à présent, chanter dans une langue que les gens ne comprenaient pas, ou peu, comme l’espagnol ou le portugais, me permettait d’être davantage dans la musique que dans le message. Avec le français, je parle à la première personne, je peux dire des choses que je ne dirais pas autrement… Mais j’y vais encore sur la pointe des pieds. C’est quand même assez vertigineux comme espace de parole !
Quant à la sonorité, elle est aussi très différente. J’ai appris à chanter avec l’allemand et l’italien. Non seulement j’ai mis du temps à trouver le français musical, mais la place de la voix y est également plus difficile, plus pointue. J’ai commencé à chanter en français en reprenant des œuvres de Barbara ou de Brassens puis, au fur et à mesure, j’ai aimé m’exprimer dans ma propre langue.
On sera une quinzaine sur scène. On débutera par une cantate de Bach et on terminera par du Queen, tout en passant par du jazz argentin, mais aussi du rap.
Le Théâtre de la Concorde vous a donné carte blanche. Alors, que se passera-t-il 28 mars ?
Pour cette date, j’invite le public « Dans mon salon ». Un concert lors duquel on parcourra différents répertoires. Je serai accompagnée de l’ensemble classique et des chanteurs de Canto Allegre. En tout, on sera une quinzaine sur scène. On débutera par une cantate de Bach et on terminera par du Queen, tout en passant par du jazz argentin, mais aussi du rap.
On a essayé de rendre ce concert le plus chaleureux et le plus ouvert possible. L’idée, c’est que le spectateur puisse s’y sentir à l’aise. Ce n’est pas grave s’il applaudit au milieu de la cantate ou s’il s’endort. Il peut même chanter et danser avec nous ! C’est d’ailleurs comme cela que chaque concert se déroule. J’essaie d’éviter cette solennité que l’on peut retrouver dans les concerts classiques. Mon but, c’est que les gens viennent pour souffler, oublier et se remplir de belles énergies pendant deux heures.
Et le 29 mars ?
On retrouvera sur les deux dates Fernando Fiszbein, entouré de son groupe Carabanchel. Mais le 29 mars, nous serons quatre sur scène. J’y chanterai essentiellement des chansons en français de mon dernier album, mais aussi des titres latinos.
Même si ce sont deux dates très différentes, on retrouvera à chaque concert un certain éclectisme et un ensemble de découvertes de répertoires, de chanteurs, de chanteuses, avec des reprises d’artistes relativement peu connus du grand public, comme Mercedes Sosa ou Chico Buarque. Et je suis très heureuse de me dire que les gens vont découvrir ces artistes grâce à ces concerts.
Tout le mois de mars, le Théâtre de la Concorde consacre sa programmation à la question du genre, et surtout, à sa déconstruction. Qu’est-ce que ce thème vous inspire ?
C’est fou de constater à quel point cette question, qui a traversé les siècles et les mythologies, peut générer autant de haine et de violence dans le monde. J’ai d’ailleurs appris récemment que, sous la République de Weimar, il était possible d’indiquer sur sa carte d’identité un genre différent de celui assigné à la naissance. Est-ce que l’on se souvient de la panique qu’une femme en pantalon provoquait il y a encore quelques années ? C’est terrifiant…
Votre dernier album s’intitule « Attendre que le soleil revienne ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Ce titre fait écho à la chanson de Barbara, « Attendez que ma joie revienne », dont je me suis inspirée. Mais je pourrais également citer cette phrase : « Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle. » [Baudelaire] Et c’est vrai qu’à Paris, le soleil manque, on ne peut pas dire le contraire. Mais ce titre est aussi métaphorique, parce que j’ai eu du chagrin ces derniers temps…
Dans le morceau « Quitter Paris », vous évoquez la tentation que vous éprouvez parfois, mais aussi la difficulté, à vous résoudre à cet « abandon ». Qu’est-ce qui vous lie à notre capitale ?
Sa beauté ! Je suis allée dans presque toutes les capitales du monde et, à chaque fois, je suis subjuguée par la magie de Paris. Mais surtout, par l’incroyable offre culturelle qu’elle propose. C’est fou ! Je pense que les Parisiens ne s’en rendent pas toujours compte, d’autant qu’elle peut être très bon marché.
À Paris, en dépensant peu de sous, on a accès à un nombre incalculable de musées, de pièces, de concerts… C’est tout simplement fascinant. On n’a pas assez d’une vie pour tout voir.
C’est d’ailleurs la pratique tarifaire adoptée au Théâtre de la Concorde : tout est gratuit pour les mineurs, les demandeurs d’emploi, les titulaires de minimas sociaux, les personnes en situation de handicap et leur accompagnateur. C’est génial ! À Paris, en dépensant peu de sous, on a accès à un nombre incalculable de musées, de pièces, de concerts… C’est tout simplement fascinant. On n’a pas assez d’une vie pour tout voir.
Y a-t-il des théâtres que vous appréciez plus particulièrement ?
Le Théâtre de la Porte-Saint-Martin (10e), où j’ai joué et mis en scène. La programmation de Jean Robert-Charrier est remarquable. Je pense aussi au Théâtre de l’Atelier (18e), où j’ai aimé chanter, c’est un lieu un peu à part. Sans oublier le Trianon (18e), une salle qui a gardé une âme qui me plaît. Enfin, j’ajouterais l’Opéra-Comique (Paris Centre), l’une des plus belles salles que j’ai jamais vues.
Côté musées, quels sont vos lieux favoris ?
J’adore le musée d’Orsay (7e), tout y est beau. J’aime aussi beaucoup les plus petits musées, comme celui de Montmartre (18e), Marmottan-Monet (16e) ou Carnavalet (Paris Centre), que je trouve super. Je pourrais pratiquement tous les citer !
Et avez-vous des quartiers de prédilection ?
Les bords de Seine me touchent beaucoup parce qu’il y a des animaux et que tout y est calme. J’ai d’ailleurs récemment appris dans un reportage que la moule d’eau douce était réapparue, alors qu’elle avait disparu depuis 1974 à cause de la saleté du fleuve. Et puis, les bords de Seine, cela a très peu changé depuis les images de Doisneau… C’est toujours agréable de voir un cours d’eau au milieu de la ville.
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