Joséphine Jacques-André-Coquin, escrimeuse : « Garder la notion de plaisir quand on fait du sport »
Rencontre
Mise à jour le 23/10/2023
Escrimeuse professionnelle, Joséphine Jacques-André-Coquin est l’une des invitées de Mon Premier Festival 2023. A l’occasion de la diffusion du documentaire Graine de Champion, elle participera au débat sur l’enfance singulière des sportifs de haut niveau.
Dans le documentaire
danois Graine de Champion (2016), diffusé jeudi 26 octobre à 10 h 15 au MK2 Quai de Seine, les spectateurs feront la connaissance de trois jeunes
sportifs, chacun rencontrant des problématiques différentes. L'occasion de parler de ces aspects du sport avec Joséphine Jacques-André-Coquin, l'une des 50 athlètes soutenus par Paris pour les Jeux olympiques et paralympiques.
Le petit Ruben, premier portrait du documentaire, pourrait être celui qui se rapproche le plus de vous puisqu’il pratique l’escrime. C’est un garçon très doué, mais il pique des colères lorsqu’il ne gagne pas. Comment gérez-vous les défaites ?
Quand il perd, Ruben crie, se frappe la tête et se
jette par terre. Ce n’est pas du tout mon genre ! Même si clairement, j’ai
eu ma part de désillusions… Quand je pars pour une compétition d’escrime,
j’y vais avant tout pour « jouer » le plus de matchs possible. C’est
ça qui me plaît dans mon sport. Ce qui me stimule en compet', c’est que plus je gagne, plus je peux affronter des adversaires forts. C’est comme ça
que j’ai été qualifiée presque sans m’en rendre compte à mes premiers
championnats du monde : je ne m’étais pas fixé d’objectif, je n’ai pas
cette vision à long terme, je veux juste continuer, droit devant !
Reste que quand je
perds, surtout si c’est une adversaire que j’estime moins bonne que moi, je
suis triste. Mais c’est un moteur : je retourne alors à l’entraînement
afin de la battre au prochain match.
Et puis quand on est jeune, comme
Ruben, on vise souvent le « cadeau » offert aux gagnants. Je me
souviens comme j’avais envie de gagner tous mes matchs pour repartir avec le lecteur
DVD portable de mes rêves. Quand on perd, on dit aussi adieu à cette carotte !
Un palmarès déjà bien garni
- 2022 : vice-championne de France
- 2021 : championne de la Coupe du monde en individuelle et en équipe
- 2018 : médaille d’argent à l'épée individuelle aux Jeux méditerranéens
- 2016 : participation aux Jeux de Rio
- 2011/2014/2016 : troisième puis deuxième place aux championnats d'Europe en équipe
- 2021 : championne de la Coupe du monde en individuelle et en équipe
- 2018 : médaille d’argent à l'épée individuelle aux Jeux méditerranéens
- 2016 : participation aux Jeux de Rio
- 2011/2014/2016 : troisième puis deuxième place aux championnats d'Europe en équipe
Nastya, danseuse russe, est la deuxième enfant mise en avant dans Graine de Champion. Très jeune, elle a été prise en main par l’Académie de danse de Saint-Pétersbourg, avec des exigences folles pour perfectionner ses gestes… parfois dans la douleur. Comment avez-vous envisagé la pratique du sport quand vous avez commencé, enfant ?
J’ai toujours été très sportive, j’aimais me défouler. À 7 ans, au centre de loisirs de Drancy (Seine-Saint-Denis), j’ai été initiée à
l’escrime et j’ai demandé à mes parents de m’inscrire en club. Ça a toujours été mon choix. Avec ma petite sœur [Lauren Rembi,
également membre de l'équipe de France d'épée, ndlr], on est rapidement tombées dans la marmite, surtout grâce au maître d’armes Ignace qui nous a pris sous son aile. Je suis restée plus de vingt ans dans ce club, même après avoir intégré l’Insep, et ce n’est que l’an
dernier que j’ai intégré la section escrime du PUC.
L’escrime, et notamment l’épée que je pratique, est un sport
qui demande des capacités physiques – rapidité, réactivité, endurance, posture
et maintien – mais aussi mentales – observation,
anticipation… Les combats durent trois minutes, pendant lesquelles l’adversaire
essaie de faire une touche : ça demande, tel un joueur d’échecs, un sens
de l’analyse important et une concentration extrême.
Je m’entraîne aujourd’hui environ vingt-cinq heures par semaine à l’Insep
(musculation, cardio, gainage en plus de la répétition des gammes du combat à l’épée),
j’ai ma « leçon » au PUC tous les mercredis en plus avec mon nouvel entraîneur. À cela s’ajoutent les activités que je pratique à côté comme le yoga
pour être plus souple, le nutritionniste, le kiné… Bref, c’est beaucoup de
travail et d’investissement.
Quand j’étais enfant, j’avais deux entraînements par semaine. Je ne voyais pas
trop la contrainte, j’ai toujours gardé la notion de plaisir. Et c’est
important que les enfants sportifs de haut niveau prennent du plaisir. Le sport
c’est un tout : cela permet de développer des capacités physiques et
cognitives, de se dépenser… mais il faut garder des à-côtés. Et ne pas négliger
ses études non plus. J’ai pu faire un double Master Environnement et santé/Management des innovations tout en m’entraînant à l’Insep avec des horaires
adaptés.
Le Japonais Chikara Tanabe est un très jeune lutteur qui veut suivre les traces de son père, champion de lutte de sumo. Quand celui-ci est présent, cela le stresse, car il a peur de mal faire. Avez-vous subi la pression de vos parents en tant que jeune sportive ?
J'ai déjà vu des parents qui crient sur leur enfant pendant
les compets, qu'il perde ou qu'il gagne ! Il
y a aussi des parents escrimeurs qui forcent leur enfant à se mettre à ce sport, même s’ils ne sont pas super doués. C'est évidemment à proscrire.
On a demandé à notre mère de ne pas assister à nos combats, car elle avait un stress communicatif, comme beaucoup de mamans !
escrimeuse
J’ai eu la chance de ne pas être dans ce
cas de figure. Mon père a toujours été très présent pendant les compétitions.
Il faut dire que sur cinq enfants dans la fratrie, on est quatre à pratiquer l’escrime ! Pour nous, il a toujours été et reste un vrai soutien. S’il n’a
jamais fait d’escrime, mon père a pratiqué le basketball jusqu’en national 3 et il sait
ce que cela implique d’être à fond dans un sport. Ma sœur et moi pouvons échanger
avec lui sur des stratégies, sur nos entraînements physiques…
Par contre, on a
demandé à notre mère de ne pas assister à nos combats, car elle avait un stress communicatif, comme beaucoup de mamans. Elle l’a bien compris. Ça se passe donc très
bien… Je sais aussi que dans certains environnements ou pays, le sport peut être
un moyen de « s’en sortir » d’où la pression des parents…
Vous vous préparez actuellement afin de participer aux Jeux olympiques en 2024… Ce n’est pas votre première expérience dans une telle compétition !
En effet, mon équipe, dans laquelle je jouais aux côtés de ma sœur, d'Auriane Mallo et de Marie-Florence Candassamy, a été sélectionnée pour les Jeux de Rio en 2016. C’était une magnifique
expérience. Et pourtant, je n’avais jamais rêvé des Jeux olympiques. J’avais
bien regardé les compétitions à la télé quand j'étais petite, mais je n’avais pas cet objectif en tête. Ça a été une belle surprise et nous avons atteint la 7e place par équipe, tandis que ma sœur est arrivée aux marches du podium en
individuel. J’ai soutenu Lauren tout du long et c’est en la regardant et
en l’encourageant que j’ai vécu le plus d’émotions. Les Jeux olympiques, ce n'est pas comparable avec les autres championnats.
Ensuite, il y a eu Tokyo en 2021, où je ne me suis pas qualifiée, ni l'équipe. Et maintenant arrive
Paris. Ça sera unique, ça ne ressemblera pas à Rio, l’évènement aura sa propre
identité. On vivra des choses forcément différentes et on aura de nouveaux
souvenirs. Enfin je l’espère !
Les Jeux olympiques, ce n'est pas comparable avec les autres championnats !
Est-ce que je serai de la partie ? J’y compte bien, mais on ne le saura que fin juin 2024. Tous les points que j’ai glanés depuis mai dernier comptent dans la qualification. Puis la Fédération française
d’escrime et la commission épée dame choisiront les athlètes qu’ils
envoient en fonction des points acquis
de décembre 2023 à juin prochain. Je dirais que pour le moment, notre équipe est
en bonne position dans la course à la sélection.
Est-ce que
ce seront mes derniers Jeux ? Qui sait, je n’ai pas de plans précis et en
tout cas, mon état d’esprit est de ne pas formuler d'espoirs qui pourraient me mettre dans un carcan. J’ai fait cette erreur plus jeune, je me suis
mis de la pression et ça a été contre-productif. Il y a des personnes que cela
peut galvaniser, pas moi. Mon objectif est sportif, un point c’est tout.
Vous avez rejoint l’été dernier la Direction de la santé publique de la Ville. Quelle est votre mission ?
Après mon Master, j’ai d’abord été responsable
qualité dans une collectivité, c’était une opportunité professionnelle. En
vue de la préparation intensive aux Jeux, j’ai trouvé à la Ville de Paris un
poste qui me correspond encore plus et qui me permet d’utiliser à la fois mes compétences
sportives, mon réseau de sportifs et mes compétences de gestion de
projet : je suis chargée de mission pour le développement de projets
sport/santé.
Je mets en place, a sein de la première maison sport-santé de Paris,
rue Curial (19e), un projet d’activité de sport adapté (APA) où l’escrime va servir d'outil pour
accompagner les personnes victimes de violence. L’escrime est un excellent sport
pour développer la confiance en soi et en les autres. Il permet aussi de renforcer l’esprit
de groupe. Je n’en suis qu’aux prémices de ce projet. Cela me mobilise seize heures par semaine et me laisse donc le temps de focaliser le reste de mon énergie sur mes entraînements.
L'escrime, sport de combat
L'escrime est un sport où les deux adversaires essaient de se toucher avec leurs armes. Celles-ci sont de trois types d'armes : l’épée, le sabre et le fleuret. Les épreuves sont individuelles ou par équipes. Joséphine Jacques-André-Coquin a choisi l'épée, « l’arme de combat par excellence. Plus lourde que le fleuret, elle permet de toucher avec la pointe uniquement et tout le corps est considéré comme surface valable. On dit que c'est l'arme de la maturité ! ».
Les assauts sont chronométrés : trois minutes pour les assauts en cinq touches, neuf minutes pour ceux en quinze touches. Deux situations sont possibles : un des deux tireurs arrive à cinq ou quinze touches avant la fin du temps réglementaire : il est alors déclaré vainqueur. Si aucun des tireurs n’a atteint ce score, le tireur qui a le score le plus élevé gagne l’assaut.
Enfin l'escrime nécessite un équipement très spécifique : pantalon, veste, sous-cuirasse, gants et le fameux masque protégeant les yeux et la carotide.
Les assauts sont chronométrés : trois minutes pour les assauts en cinq touches, neuf minutes pour ceux en quinze touches. Deux situations sont possibles : un des deux tireurs arrive à cinq ou quinze touches avant la fin du temps réglementaire : il est alors déclaré vainqueur. Si aucun des tireurs n’a atteint ce score, le tireur qui a le score le plus élevé gagne l’assaut.
Enfin l'escrime nécessite un équipement très spécifique : pantalon, veste, sous-cuirasse, gants et le fameux masque protégeant les yeux et la carotide.
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