Minima Gesté, porteuse de la flamme olympique : « C’est un message très fort pour la communauté LGBTQIA+ »

Rencontre
Mise à jour le 12/07/2024
Minima Gesté, porteuse de la flamme pour les Jeux de Paris 2024.
Elle est l’un des visages des Jeux olympiques et paralympiques 2024. Drag queen engagée pour la lutte des droits de la communauté LGBTQIA+ et contre le VIH/sida, Minima Gesté (de son nom civil, Arthur Raynaud), sera porteuse de la flamme olympique à Paris le 14 juillet prochain. Nous l'avons rencontrée.

Comment t’es-tu retrouvée relayeuse de la flamme ?

Je me suis réveillée un beau matin avec un message sur ma boîte Instagram de la part d'Anne Hidalgo. Elle souhaitait qu’une drag queen porte la flamme olympique et j’ai été choisie en raison de mes différents engagements politiques et associatifs.

Quelle a été ta réaction quand tu as su que tu avais été sélectionnée ?

J'étais trop contente ! Je m’en souviens parfaitement : j’étais dans une chambre d’hôtel, juste avant de commencer un booking, et je n'en croyais pas mes yeux. C’est une énorme fierté et je me suis dit que j’allais le faire pour trois raisons. D’abord pour la représentation, parce que j’estime que c’est un message très fort pour la communauté LGBTQIA+ qu’une drag queen porte la flamme olympique. Et puis, je savais que ça allait embêter certaines personnes, que ça provoquerait une levée de boucliers.
Je ne m’attendais peut-être pas à autant, mais j’avais conscience que ça allait faire parler de nous, ce qui est cohérent avec notre métier de drag qui consiste quand même à remuer un peu l’ordre établi. Et enfin, même si on fait du drag avant tout pour les autres, il y a aussi une forme d’ego. Je sais que cette occasion ne se représentera jamais, je ne pouvais donc pas la laisser passer.

C'est une énorme fierté.

Minima Gesté
drag queen et relayeuse de la flamme olympique

Est-ce que tu as ressenti une petite appréhension ?

Non, je n’ai hésité à aucun moment parce que j’ai compris très vite pourquoi je voulais le faire et pour moi, c’était ça le plus important. Après, je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de polémiques, je n’avais pas réalisé combien certaines personnes sont contre le fait qu’une drag queen porte la flamme olympique. Malheureusement, je m’en suis rendu compte très vite suite à l’annonce de ma participation publiée par le compte Instagram Paris Ma Ville. Toute cette violence crasse, ça m’a donné encore plus de raisons de le faire !

Au milieu de cette vague de haine, tu as également reçu énormément de soutien. Comment l’as-tu accueilli ?

Ça a été très puissant ! Très rapidement, j’ai été submergée par des messages à la fois de haine et de soutien. Heureusement, j’ai été très entourée par mes amis et ma famille, qui m’ont permis de garder les pieds sur terre. Et surtout, j’ai continué à travailler parce que répondre aux haters, ce n’est pas ce qui paie mon loyer ! Bien sûr qu’il y a des personnes qui sont contre, mais je fais du drag avant tout pour ma communauté et ses alliés.

À ce propos, en tant que drag queen engagée et militante, comment réussis-tu à continuer à défendre un discours pédagogique, même face à des personnes qui ne sont pas du tout réceptives voire totalement hermétiques ?

Les personnes qui sont frontalement contre, celles dont je sais que leur opinion est déjà faite, c’est-à-dire toutes les personnes qui m’envoient des messages horribles sur mes réseaux, je ne cherche pas à leur parler. Mais pour le reste, je reste dans la pédagogie, dans l’éducation. C’est par le biais de la visibilité que je peux montrer aux gens ce qu'est le drag et leur permettre de s’y intéresser davantage.

C'est par le biais de la visibilité que je peux montrer aux gens ce qu'est le drag.

Minima Gesté
DRAG QUEEN ET RELAYEUSE DE LA FLAMME OLYMPIQUE

Que dirais-tu d’ailleurs aux gens qui ne connaissent pas du tout la culture drag et qui ne comprennent pas pourquoi il est important qu’une drag queen porte la flamme olympique en 2024 ?

Je lis beaucoup de commentaires qui disent que c’est une honte, qu’il y a tellement de sportifs plus méritants pour la porter. Il faut rappeler que la flamme olympique n’est pas portée uniquement par des sportifs ! Justement, elle sert à rassembler toutes les personnes touchées par les valeurs de l’olympisme, qui sont celles de l’unité, de la force et du courage. Il est possible que la personne qui me passe cette flamme soit le boulanger du coin, l’éboueuse de mon quartier ou un acteur très connu. Il faut représenter tout le monde et j’ai le droit à cette visibilité !

Tu vis à Paris depuis des années, mais tu es originaire de Toulouse. Quel est ton rapport à Paris ?

J’ai quitté Toulouse à 19 ans pour faire des études d’ingénieur à Grenoble puis je suis arrivé en 2005 à Paris pour le travail. Dès que j'ai mis les pieds dans cette ville, je me suis dit : « C’est là que je veux être. Je suis faite pour être ici ». Paris a créé qui je suis. Ça a forgé Minima, puisque c’est ici qu’elle est née deux ans après être arrivée, et puis ça a également construit Arthur. Je dois beaucoup à Paris, c’est une ville que j’aime énormément, notamment pour toute la liberté qu’elle m’a permis d’exprimer.

Je dois beaucoup à Paris. C'est une ville que j'aime énormément, notamment pour toute la liberté qu'elle m'a permis d'exprimer.

Minima Gesté
DRAG QUEEN ET RELAYEUSE DE LA FLAMME OLYMPIQUE

Hormis le 14 juillet où l’on pourra t’admirer plus flamboyante que jamais, où est-ce que l’on te verra bientôt ?

On peut me voir tous les week-ends dans différents endroits. J’organise d’abord un blind test dans le bar La Birreria (13e). Les dimanches, je fais également des performances dans le restaurant Wanted (19e), lors de brunchs drag appelés The brunch and Queen. Et enfin, pour terminer la semaine et le week-end en beauté, j’organise le dimanche soir des bingos drag à La Folie (19e).