Reportage: Quand Rosa Parks fait le mur

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Mise à jour le 07/03/2016

Attention, cet article n'a pas été mis à jour depuis le 07/03/2016, il est possible que son contenu soit obsolète.
Mur-Forum Rosa Parks (c) GFR, Véronique Drougard

Sommaire

Vous l'avez peut-être aperçue en allant prendre le RER à la nouvelle gare Rosa Parks. L'immense fresque rue d'Aubervilliers, qui rend hommage à la militante américaine des droits civiques, est le fruit de la collaboration de l’association GFR, d'artistes reconnus et d'habitants du quartier. Gros plan sur cette œuvre entièrement contributive, née du budget participatif.
Atelier mardi 8 mars 2016

Venez participer, mardi 8 mars à l'atelier Façades de sérigraphie/affiches féministes, organisé par le collectif GFR et l'association La Rage, c'est gratuit et ouvert à toutes et tous. Rendez-vous de 15h à 18h, à l'angle des rues Riquet et Aubervilliers, Paris 18e/19e.
Martial Buisson, directeur de Génération Freedom Ride (GFR) nous accueille dans leurs lumineux locaux. L’association porte le nom de leur premier projet, un documentaire sur les mouvements des droits civiques. «Ça fait huit ans qu'on existe et chaque année, on essaye de créer un projet culturel avec différentes parties, notre rôle étant de faire la jonction. Notre objectif est de sensibiliser via la pratique artistique et de créer une œuvre.» La dernière en date, nous l'avons sous les yeux, en face des locaux de l'association: Rosa Parks fait le mur, fresque street art de plus de 400 mètres, inaugurée en décembre dernier et clin d’œil à l'ouverture récente de la gare RER du même nom, près de la porte d'Aubervilliers.

1 Mur-Forum Rosa Parks (c) GFR, Véronique Drougard
Rosa Parks, c'est cette jeune femme noire qui refusa en décembre 1955, comme la loi l'y obligeait, de céder sa place à un homme blanc dans un bus. L’œuvre traduit les valeurs de cet emblème des droits civiques, interrogeant la question du vivre ensemble. Réalisée en lien avec les habitants du quartier et autour de rencontres débats, elle regroupe le travail des street-artistes Bastardilla, Tatyana Fazlizade, Kashink, Katjastroph et Zepha.
Rstyle, qui fait la promotion de la culture urbaine et organisent l'Urban Film Festival, est intervenu dans le cadre de la galerie à ciel ouvert, «On a piloté le projet mais ils en ont fait partie intégrante et ont sollicité des artistes tel que JonOne, Combo, Batsh, Doudou Style et Zeer». précise Martial. «On défend un art de qualité. On rémunère les artistes et leur œuvres doivent pouvoir servir leur carrière.»
Début 2015, la mairie du 19e arrondissement propose à GFR de revaloriser cette partie de la rue d'Aubervilliers, située au cœur d’une zone cosmopolite. Le projet, dans le cadre du budget participatif, a été sélectionné sur le volet reconquête urbaine et a reçu un très grand soutien des mairies du 18e et 19e arrondissement. La fresque est dans le 18e et l'association, dans 19e «rien d’étonnant donc» sourit Martial.

Une œuvre engagée et collaborative

GFR Ateliers Rosa Parks
«Ici il y a régulièrement des rixes interquartiers, entre jeunes du 18e et 19e, sur le pont Riquet un peu plus loin. Notre démarche interroge aussi sur ces questions de territoire et de communauté» nous explique Martial. Le projet visait à reconquérir l'espace de la rue d'Aubervilliers en faisant appel aux habitants du quartier et en les sollicitant sur la lutte contre les discriminations et les inégalités hommes femmes. «Nous sommes transverses, nous faisons le lien entre les habitants, le territoire, et les artistes, ce sont les trois points cardinaux de notre action.»
En octobre et novembre dernier, l'association a donc organisé des débats avec les habitants du quartier, des élus locaux, des personnes du secteur associatif «comme le président de SOS racisme». Ces échanges ont permis de traiter, avec en filigrane la figure emblématique de Rosa Parks, la notion du vivre-ensemble, des frontières, le lien entre l'égalité hommes-femmes et la place de la femme dans l'espace public, instaurer un dialogue interreligieux. Les artistes se sont majoritairement joints à ces débats, leurs œuvres devant en partie les retranscrire.

Les habitants ne devaient pas se sentir floués

Martial Buisson
Président de GFR
Parallèlement, des ateliers habitants/artistes ont été organisés avec des travaux pratiques: utilisation de bombes de couleurs, confection d’affiches militantes, etc. «Concrètement, Kashink a invité des habitants à s’exprimer à l’intérieur de ses œuvres, Bastardilla a fait un travail en lien avec les migrants car ça a beaucoup marqué les jeunes». Concernant Tatyana, un brunch a été organisé avec des femmes du quartier et des militantes. Martial résume: «Elles ont débattu autour de: c'est quoi être une femme dans l’espace public? Qu’est-ce que vous aimeriez dire sur l’égalité homme-femme? Son œuvre s'est ainsi constituée de portraits de femmes et de phrases que ces dernières souhaitaient voir sur le mur.»
GFR Ateliers Rosa Parks

La suite

La fresque n'a étonnamment pas vocation à être pérenne car le mur, avec les travaux de la gare, va être détruit. D'ici là, «nous allons organiser des ateliers et des visites, si possible une fois par mois. Véronique Drougard, directrice artistique, présenterait le travail des artistes, leurs œuvres, relaterait quelques anecdotes…» Tout cela en lien avec Tourismes 93 qui propose déjà des visites «alternatives», usines, spots de street art, construction du métro,…

Le 8 mars, a lieu la Journée internationale du droit des femmes. Ces dernières subissent au quotidien harcèlement de rue, violences physiques et verbales, certaines changent leur façon de s’habiller par peur d’être interpellées ou insultées. Il est primordial qu'elles puissent prendre leur place dans l’espace public en toute sécurité et affichent leurs droits. Pour ce faire, GFR, en lien avec le collectif féministe La Rage, organise l'atelier «Façades» et proposent au public d’imprimer en sérigraphie des affiches dans la rue et de les coller sur le mur-forum Rosa Parks. À Martial Buisson qui nous confiait: «Par la suite, on aimerait aussi continuer à organiser des événements dans le quartier», on pourrait répondre que fort heureusement, ça a l'air bien parti!»