À la découverte des orgues parisiennes (1/3)
Série
Mise à jour le 23/03/2023
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Le saviez-vous ? La Ville de Paris possède près de 130 orgues, soit la plus grande collection au monde. Construits entre le XVIIe et le XXIe siècle, ces instruments résonnent dans les églises, les temples et les synagogues, mais aussi dans les conservatoires et les salles de spectacle. Partons à leur découverte.
L’orgue de tribune de l’église Saint-Eustache (Paris Centre), le plus monumental
8000 tuyaux, 147 rangs, 101 jeux… Des chiffres à faire tourner la tête de plus d’un organiste. L’instrument de l’église Saint-Eustache est l’un des plus imposants de France, avec ceux de Notre-Dame de Paris et Saint-Sulpice (6e).
Saint-Eustache possède un orgue depuis le XVIe siècle. Mais son visage a bien changé depuis ses origines. Au début du XIXe siècle, l’orgue de Saint-Germain-des-Prés est installé à Saint-Eustache. En 1844, à la suite de la chute d'une chandelle lors de son entretien, l’orgue est détruit par les flammes. Ce n'est qu'en 1854 que l'orgue est reconstruit, enchâssé dans le buffet monumental, chef-d'œuvre encore visible aujourd'hui, réalisé par l'architecte Victor Baltard.
Il sera de nouveau remis sur pied en 1879 après les événements de la Commune. Sa dernière restauration d’envergure, réalisée par Jan Leendert Van den Heuvel, date de 1989.
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L’orgue de Saint-Eustache présente une particularité rare en France : une console mobile placée au centre de la grande nef permet à l’organiste d’être vu en train de jouer. Car à la différence des autres musiciens, les organistes sont la plupart du temps cachés par leur instrument et invisibles aux yeux du public. Autre différence importante, ces musiciens ne possèdent pas leur instrument. Ils sont titulaires, un temps donné, de l'orgue d'une église.
Thomas Ospital interprète la Toccata et fugue en ré mineur de Jean-Sébastien Bach (vidéo)
Chaque dimanche à 17 h, l'orgue de tribune résonne lors de concerts gratuits donnés par les organistes titulaires de l'église Saint-Eustache. Nous avons filmé Thomas Ospital, organiste titulaire de l'orgue de tribune, pour vous en donner un avant-goût.
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Parrainez l'un des 8000 tuyaux de l'orgue de tribune !
Et si vous parrainiez une petite partie du grand orgue de l'église Saint-Eustache ? Le grand orgue et l'orgue de chœur, très sollicités, montrent des signes de faiblesse. Le public peut participer à cette vaste rénovation en parrainant l'un des 8000 tuyaux du grand orgue, des plus petits aux plus grands.
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L’orgue de tribune de l’église Saint-Nicolas-des-Champs, héritage de François Henri-Clicquot (Paris Centre)
S'il ne faut retenir que le nom de deux facteurs d'orgues - c'est ainsi que l'on nomme les « fabricants » d'orgues -, ce seraient immanquablement François-Henri Clicquot (1732-1790) et Aristide Cavaillé-Coll (1811-1899).
En 1773, François-Henri Clicquot n'est pas un paroissien de l'église de Saint-Nicolas-des-Champs comme les autres. Son grand-père, Robert Clicquot (1645-1719), lui a peut-être transmis le goût de ce métier particulier : c'est lui qui a construit l'orgue de la chapelle du château de Versailles en 1710. Ainsi, lorsque l'église Saint-Nicolas-des-Champs cherche à faire résonner un nouvel orgue entre ses murs, elle choisit François-Henri Clicquot pour mener à bien ce projet.
Le jeune facteur d'orgue se met à l'ouvrage et construit un instrument de 45 jeux sur 5 claviers et pédalier. Une première dans l'histoire des orgues. L'œuvre de Clicquot échappe aux destructions de la Révolution. Aujourd'hui, c'est l'un des instruments les plus anciens à Paris. Il a aussi la particularité de ne pas avoir été modifié par d'autres facteurs d'orgues par la suite et a ainsi gardé son authenticité.
L'orgue de tribune de l'église Saint-Sulpice, un son typiquement Cavaillé-Coll (6e)
C'est à
Aristide Cavaillé-Coll que l'on doit l'orgue de tribune actuel de Saint-Sulpice. Alors qu'il n'a que
22 ans, ce dernier se voit confier la réalisation du grand orgue de la
basilique de Saint-Denis, inauguré en 1841.
C'est le
début de la consécration pour Cavaillé-Coll : les paroisses s'arrachent
son talent pour doter leur église d'un orgue sorti de ses ateliers. On en
compte une cinquantaine rien qu'à Paris, et plus de 500 dans le monde entier, du
Portugal au Chili en passant par la Roumanie et l'Inde.
Un orgue à la hauteur de l'église Saint-Sulpice
À la moitié du XVIIIe siècle, la construction de Saint-Sulpice est presque achevée. C'est le moment de construire un orgue. On fait appel au plus renommé des facteurs d'orgue à cette époque : François-Henri Clicquot. L'inauguration a lieu en 1781.
Quelques années plus tard, en 1789, c'est la Révolution. Les églises sont des cibles de choix pour les révolutionnaires et les orgues ne sont pas épargnées. Celui de Saint-Sulpice n'échappe que de justesse à un triste sort : « Un souffleur, en charge de la soufflerie de l'orgue, a eu l'intelligence de placer des scellés sur la porte », raconte Daniel Roth, organiste titulaire à Saint-Sulpice depuis 1985. « Les autres révolutionnaires en ont déduit qu’il n’était plus nécessaire de s’attaquer à l’église ». L'orgue est sauvé.
Un orgue qui « sonne comme un chœur de vieilles femmes »
En 1832, le célèbre Félix Mendelssohn (1809-1847) est de passage dans la capitale. Le compositeur, chef d'orchestre et pianiste allemand, ne peut s'empêcher d'aller jeter un œil à l'orgue de Saint-Sulpice dont l'existence a résonné bien au-delà des frontières françaises.
Quelle n'est pas sa surprise lorsqu'il découvre qu'il « sonne comme un chœur de vieilles femmes », selon ses mots. Dès 1834, une restauration, qui durera dix ans, débute. Mais celle-ci ne sera pas suffisante ; l’instrument n’est pas à la hauteur de l’édifice.
En 1854, décision est prise de refaire l'orgue de chœur et l'orgue de tribune. Cette fois, on fait appel à Cavaillé-Coll. Les travaux de l'orgue de tribune commencent l'année suivante, l'inauguration a lieu en 1862.
Cavaillé-Coll a conservé tous les tuyaux de Clicquot, ce qui représente 40 % du total des tuyaux du nouvel orgue. Ainsi, tous les répertoires des XVIIe, XVIIIe et XIXe peuvent être joués sur cet instrument qui possède 7 000 tuyaux. Après ce projet gigantesque, qui a coûté trois fois plus cher que prévu, Cavaillé-Coll se trouve au bord de la faillite.
L'orgue de chœur de Saint-Jacques du Haut-Pas (5e) appartenait au « baron mélomane »
À l'église de Saint-Jacques du Haut-Pas, il y a deux orgues, comme souvent dans les églises. Un orgue de tribune, en hauteur et généralement placé au-dessus du portail occidental, et un orgue de chœur, situé dans l'abside. Les orgues de tribune, plus monumentales, sont souvent la cible de tous les regards et de toutes les admirations. Mais dans le cas de Saint-Jacques du Haut-Pas, c'est le cas de l'orgue de chœur qui nous intéresse.
Fabriqué par Aristide Cavaillé-Coll en 1865, l'instrument n'est pas destiné à une église. Le facteur l'a construit pour le baron Frédéric Émile d'Erlanger (1832-1911), dit le « baron mélomane ». Dans sa demeure rue Taitbout, le baron aménagea un espace pour accueillir l'instrument en noyer rouge et chêne, inauguré en 1866.
Après sa mort, son fils fait don de l'orgue à la mairie de Paris en 1927 qui l'installe dans la chapelle de la Sorbonne. Ce n'est qu'en 1985 que l'orgue trouve sa place actuelle dans l'église Saint-Jacques du Haut-Pas. On peut y admirer son buffet de très grande qualité, remarquable par ses décors finement sculptés par Liénard (1801-1870) et les bouches peintes de ses tuyaux.
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