Au supermarché "Les 400 coop", ce sont les clients qui tiennent la boutique
Reportage
Mise à jour le 15/04/2019
Dans le 11e arrondissement, un groupe d'habitants a ouvert un supermarché sous la forme d'une coopérative autogérée : "Les 400 coop". Les 517 coopérateurs entendent reprendre en main leur alimentation en privilégiant une production locale, équitable et solidaire. La porte est grande ouverte à tous ceux qui seraient tentés par l'aventure.
Jeudi matin, 65 boulevard de Charonne (11e), c’est jour de livraison. Des palettes sont transportées dans le local, des personnes les déchargent et les rangent sur les étagères. Malgré le panneau à l’entrée "Bienvenue chez vous", on ne rentre pas ici complètement comme dans un moulin ! Il faut avoir pris des parts. Vincent qui fait partie de l'aventure depuis le début explique : "Ici, c’est un supermarché collaboratif. L’idée c’est de se regrouper pour autogérer un supermarché. Vous prenez des parts dans la coopérative, la cotisation coûte 100 euros, et seulement 10 euros pour les minima sociaux, handicapés et étudiants. On devient propriétaire à vie de 10 parts à 10 euros de la SAS 400 coop."
La contrepartie ? Chaque coopérateur doit donner trois heures de son temps toutes les quatre semaines pour s’occuper du lieu. Il peut alors faire ses courses dans le commerce. Il a également le droit de vote. Chaque coopérateur peut ainsi prendre les décisions pour gérer la coopérative. Le but n’est pas de faire des bénéfices mais de réduire les marges de fonctionnement et la main d'œuvre puisque tout le monde y va de son coup de main.
"L’idée, c’est de pouvoir faire ses courses au même endroit. Nous avons donc toutes sortes de produits, de l’hygiène à l’alimentation. C’est nous qui décidons de ce que nous proposons à la vente. Il y a un groupe approvisionnement avec une charte assez stricte. Nous recevons les produits, nous les goûtons et si nous hésitons entre deux produits identiques, nous faisons le choix sur la façon dont le produit est emballé."
En effet, l’essentiel des produits alimentaires, d’entretien, d’hygiène sont majoritairement bio et respectent les codes de production ou d’emballage antigaspi par exemple. L'objectif est de permettre un accès à une alimentation saine, qualitative et durable, mais aussi d'encourager une économie de proximité avec des producteurs locaux et aussi de lutter contre le gaspillage alimentaire et le suremballage par la promotion de la vente en vrac.
"Nous sommes en période de test, on cherche… L’idée est d’être le plus proche des producteurs. Là où nous sommes le plus près ce sont pour les bières, car il y a une multitude de brasseurs dans Paris, le plus près est à cinq minutes d'ici, sourit Vincent. On cherche aussi sur la région parisienne, le Grand Paris. Il faut aussi que les prix soient intéressants et on va parfois s’engager sur une longue durée afin que le producteur puisse créer une production spéciale pour nous."
Le modèle est celui de La Louve, autre structure du genre soutenue par la ville de Paris, ouverte fin 2016, rue des Poissonniers (18e) mais à une échelle réduite puisque la surface de vente de 120 m2 est ici dix fois moindre. Et La Louve compte aujourd’hui 7 000 coopérateurs. Mais comme pour La Louve, la coopérative du 11e a reçu le soutien de la Ville de Paris sous la forme d’une subvention de 25 000 euros et de neuf mois de loyer gratuit du local appartenant à Paris Habitat, premier bailleur social de la Ville de Paris et proposé par le GIE Paris Commerces.
Ici, les bénévoles ont tous les âges et il y a beaucoup des femmes, comme Julie qui est devenue coopératrice il y a trois mois. « Quand j’ai vu que c'était à deux minutes de chez moi je n'ai pas hésité, raconte-t-elle. Je suis venue à une réunion, les gens m’ont plu, les principes étaient là, j'ai sauté le pas." Pour cette photographe de 36 ans qui a choisi de ne travailler qu'à mi-temps pour se laisser du temps pour s’investir en tant que citoyenne, c'est une vraie chance. "En plus cela me permet de rencontrer des voisins et c’est un super avantage car ce n’est pas toujours facile. Je me réapproprie mon quartier en venant dans un lieu comme cela."
Vincent synthétise ce qu'il pense du lieu : "Pour moi c’est reprendre le pouvoir sur son acte d’achat. Je peux aller à la manif climat, militer ou combattre un système mais j’ai deux pieds : un pied qui combat et un autre qui agit. Il ne faut pas seulement la philosophie il faut l’action. Et puis simplement, j'ai envie de choisir ce que je mange. Pour moi la nourriture c’est le premier « médicament » qu’on ingurgite alors je préfère trois carottes bio que six produites n’importe comment
Prochains objectifs : accueillir de nouveaux coopérateurs, peaufiner les choix des produits mis à la vente et être aussi un vrai lieu de vie dans le quartier : "On a un lieu de convivialité où tout le monde peut venir boire un café. On organise des soirées projection ou débat et on invite qui veut, même s'il n'est pas coopérateur. Mais, conclut Vincent, évidemment plus on sera de coopérateurs et mieux le magasin pourra tourner."
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