« L'architecture parisienne doit beaucoup à Gabriel Davioud »
Rencontre
Mise à jour le 09/02/2022
Sommaire
Le 6 avril 1881 s’est éteint Gabriel Davioud. Moins connu que son contemporain Charles Garnier, Davioud est pourtant un architecte majeur dont les réalisations ont marqué Paris de la fin du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui. Entretien avec Simon Texier, historien de l’art, spécialiste de l’architecture et de l’urbanisme contemporains et secrétaire général de la Commission du Vieux Paris.
Le Paris des jardins doit beaucoup au talent de Gabriel Davioud (1824-1881). Auprès du baron Haussmann et d’Adolphe Alphand, l'architecte a contribué, par la multiplicité de ses réalisations, à redessiner le paysage des espaces verts parisiens. Le bois de Boulogne, les Buttes-Chaumont et le parc Montsouris en témoignent encore aujourd'hui.
Son travail a aussi transformé le décor des rues parisiennes : les fontaines Saint-Michel (6e) ou du jardin des Grands explorateurs (6e) sont l’œuvre de Davioud. Le Paris des théâtres lui est également redevable : il a dessiné le théâtre du Châtelet, construit entre 1860 et 1862 ainsi que le théâtre lyrique, qui deviendra le théâtre de la Ville.
140 ans après sa mort, Simon Texier revient sur l'importance et la richesse du travail de Gabriel Davioud à Paris.
Quel était le rôle de Davioud auprès de Haussmann et d’Alphand ?
Après ses études à l’École des Beaux-Arts, Gabriel Davioud entre dès 1843 au service du Plan de la Ville de Paris, où il fera toute sa carrière. Il est d’abord sous-inspecteur puis inspecteur des travaux d’architecture, avant de devenir l’un des piliers des grands travaux haussmanniens : en 1855, il intègre le service des Promenades et Plantations. Aux côtés d’Alphand, il participe à donner au bois de Boulogne sa dimension pittoresque en dessinant kiosques, pavillons de garde, chalets et grilles, etc.
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Comment pourrait-on le qualifier : paysagiste, urbaniste ou architecte ?
Il est un peu les trois à la fois ! Tout d’abord, on peut dire que Davioud urbanise les jardins autant qu’il végétalise la ville, ce qui est une approche tout à fait nouvelle. Ensuite, les éléments d’architecture et de mobilier qu’il dessine créent un style municipal : systématiquement reproduits dans tout Paris, ils rendent très cohérent et homogène le travail engagé par Napoléon III et le préfet Haussmann. Le mobilier urbain, mais aussi les fontaines, donnent en effet à la capitale son unité et sa qualité d’usage.
Quelle est l’originalité de son travail par rapport à d’autres architectes contemporains ?
Davioud est un remarquable ornemaniste, il a un sens du détail qui lui permet de créer des édifices de grande qualité plastique. On le voit si l’on observe de près les deux théâtres de la place du Châtelet, dont la sobriété des volumes est probablement une volonté d’Haussmann, qui était très soucieux de rentabilité et de rigueur.
En façade comme à l’intérieur, Davioud y montre néanmoins son souci de donner à chaque édifice le caractère qui lui convient ; il le fait en grande partie grâce à l’ornement et à la couleur.
Davioud s’intéresse également à l’exotisme et sa carrière s’achève en apothéose, en 1878, avec la construction, pour l’Exposition universelle de 1878, du palais du Trocadéro (avec Jules Bourdais) : ses accents mauresques exprimaient une mode de l’époque, qui ne plaisait plus cependant un demi-siècle après ; on a donc démoli la salle de musique située au centre pour ouvrir la perspective sur la tour Eiffel et créer une majestueuse composition urbaine, dont l’actuel palais de Chaillot est l’héritier.
Pourquoi son nom n’est-il pas resté connu du grand public ?
Disons que Davioud était un peu moins brillant que Charles Garnier, le créateur de l’Opéra ; il était sans doute plus docile que Jacques-Ignace Hittorff, l’architecte de la gare du Nord et du Cirque d’Hiver. Mais il mérite assurément d’être mieux connu, car nul architecte n’a, mieux que Davioud, contribué à la diffusion d’une architecture et d’un paysage « municipaux ». À ce titre, il est bien l’un des principaux maîtres d’œuvre du Paris haussmannien et l’esthétique de Paris lui doit beaucoup.
Pour aller plus loin
Plus de 600 dessins légués à la Ville de Paris
Légué par les héritiers de Davioud à l'Inspection générale des services techniques d'architecture en janvier 1918, ce fonds a été oublié jusqu'à sa redécouverte en 1981 par la bibliothèque de l’Hôtel de Ville, réparti entre l'Hôtel de Ville et un pavillon de Bagatelle.
Ce sont plus de six cent dessins, dessins techniques et superbes aquarelles, qui ont permis de redonner à Davioud l’importance qui est la sienne dans la physionomie du Paris d’aujourd’hui, de l’aménagement des grands parcs et squares aux places du Châtelet, Saint-Michel ou Château d’Eau, sans oublier mobilier urbain et fontaines…
Le fonds est consultable à la bibliothèque de l’Hôtel de Ville (4e). Une part importante de ce fonds a été numérisée et est accessible en ligne.
Deux conférences en ligne
Le Comité d'histoire de la Ville de Paris a mis en ligne deux conférences autour de Davioud enregistrées au théâtre du Châtelet.
L'une de de Chiara Santini intitulée « Gabriel Davioud (1824-1881), architecte du mobilier urbain de Paris sous le Second Empire ». Cette conférence a été enregistrée au théâtre du Châtelet.
À retrouver sur la chaîne du comité d'histoire de la Ville de Paris
La seconde de Dominique Jarassé intitulée, Gabriel Davioud, architecte de Paris à retrouver également la chaîne du Comité d'histoire de la Ville de Paris.
L'une de de Chiara Santini intitulée « Gabriel Davioud (1824-1881), architecte du mobilier urbain de Paris sous le Second Empire ». Cette conférence a été enregistrée au théâtre du Châtelet.
À retrouver sur la chaîne du comité d'histoire de la Ville de Paris
La seconde de Dominique Jarassé intitulée, Gabriel Davioud, architecte de Paris à retrouver également la chaîne du Comité d'histoire de la Ville de Paris.
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