La dessinatrice Christine Boulanger croque les agents de propreté dans une expo et balaye les préjugés
Rencontre
Mise à jour le 09/09/2024
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Avec « Les Coulisses de ma ville », expo à ciel ouvert visible actuellement au square Maurice-Kriegel-Valrimont (18e), l’artiste dessine et raconte l’histoire des hommes et des femmes qui veillent à la bonne tenue des rues de Paris. L’occasion pour elle de faire changer les regards sur les agents en vert de la capitale.
« J’aime beaucoup ce lieu, la déco est chouette pour la photo et c’est vivant ! » En ce doux matin printanier, direction le 19e arrondissement et le bistrot solidaire Chez Ernest pour aller à la rencontre de Christine Boulanger. Fondatrice de Visages d’en faces – un concept artistique autour de portraits dessinés et racontés –, elle est à l’origine de l’exposition « Les Coulisses de ma ville ».
Pendant quatre mois, l’artiste a rencontré quinze agents de la direction de la Propreté et de l’Eau (DPE). Autour d’un café, Christine Boulanger nous dresse le portrait de ce projet itinérant, actuellement exposé dans le square Maurice-Kriegel-Valrimont (18e).
Pourquoi avoir croqué les agents de la Propreté de Paris dans cette expo ?
Étant Parisienne, avoir l’occasion de découvrir ce qu’il se passe « derrière » m’a fascinée. Au quotidien, on passe à côté de beaucoup de personnes : de ses voisins, des commerçants, mais également de tous ceux qui travaillent pour la ville. Et les métiers de la propreté sont le parfait exemple des nombreuses professions méconnues.
L’idée de pouvoir changer les regards et d’aller au-delà des a priori m’a tout de suite intéressée. Le projet concorde totalement avec Visages d’en faces, l’approche du portrait dessiné et raconté que j’ai créée pour mieux se connaître, individuellement et collectivement.
L’art peut-il contribuer à mettre en lumière ces précieux métiers ?
Oui ! C’est une façon de raconter autrement leur quotidien. Cela lève les zones d’ombre sur ce que nous n’imaginons pas de leur activité. L’utilité de mon art est de créer du lien. Le portrait dessiné vient matérialiser les souvenirs de mes rencontres. Il n’a aucune intention de flatter les ego, le dessin sert d’abord à court-circuiter les a priori.
Vous dites que le dessin et le portrait sont les meilleurs prétextes pour mieux se connaître. Comment se déroulent ces rencontres ?
C’est moi qui me suis déplacée sur leurs lieux de travail : dans les garages, les ateliers ou les bureaux des directions territoriales… Chaque rencontre dure deux heures. Évidemment, je ne finalise pas mes créations durant ce temps imparti. J’avais pour seules indications les noms, prénoms et fonctions de chaque agent, et cela m’allait !
Lorsque je rencontre les agents, j’ai à cœur d’en savoir plus sur leur métier, mais surtout de comprendre leur parcours et qui ils sont, eux. Je n’ai aucune trame, nous faisons souvent des digressions et elles ajoutent du sel aux récits. Je veille aussi à ne surtout pas tomber dans le descriptif de poste.
Qu’avez-vous appris de la Propreté de Paris ?
Ces rencontres m’ont permis de découvrir l’étendue des métiers et des compétences de la Propreté de Paris et la myriade de lieux de travail disséminés dans toute la capitale.
J’ignorais par exemple l’existence des responsables de
quartier, je ne savais pas en quoi consistait le métier
de magasinier. Quant
aux caveaux – le terme employé pour désigner certains ateliers en sous-sol –,
ils sont à peine visibles de l’extérieur. Les touristes les confondent
parfois avec des bouches de métro, ce qui donne lieu à des scènes cocasses
relatées dans l’un des portraits.
Ces rencontres m’ont permis de découvrir l’étendue des métiers et des compétences de la Propreté de Paris.
fondatrice de visages d'en face
Quel est le but de cette expo ?
Le but de l’exposition est de se rapprocher des gens. Paris offre tout et partout mais, en pratique, nous sommes souvent amenés à passer notre temps près de chez nous. Poser ces portraits dessinés dans la rue avec des regards directs, c’est une manière d’interpeller les passants et d’attiser leur curiosité, sans s’imposer.
« Les Coulisses de ma ville » n’est pas une exposition sur ces travailleurs de l’ombre… pas seulement en tout cas ! Ce sont des hommes et des femmes avant tout, qui sont des acteurs du lien social et veillent au bien-être des Parisiens. Ils ont à cœur de protéger et valoriser l’espace public de la capitale. Peut-être que leurs parcours peuvent inspirer ceux qui les découvrent et qui s’y intéressent !
Bien loin de l’image des artistes planqués dans leurs ateliers, vous créez avec une tablette…
J’ai toujours trouvé très encombrant le matériel de dessin « classique ». Le chevalet et les pots de peinture m’ont vite embêtée. Quand les tablettes graphiques se sont développées, j’ai trouvé cela fabuleux. Je peux emporter mon studio dans mon sac à main !
Être nomade me permet de m’occuper de l’essentiel : aller à la rencontre de l’autre. C’est génial d’utiliser l’outil le plus récent en matière de dessin : la tablette graphique et le plus ancien, la main.
Avez-vous perçu une réaction particulière de la part des agents lorsqu’ils ont découvert vos réalisations ?
Je me souviendrai toujours d’un agent qui m’a dit : « Ma femme est fière de ce que je suis et, maintenant, elle est fière de ce que je fais. » C’est magique.
J’ai été très fière de voir leur engagement dans le projet et la loyauté qu’ils m’ont accordée. Ils étaient là jusqu’au bout. À l’approche de la première inauguration officielle, j’ai eu peur de perdre ce lien privilégié que j’ai créé avec eux. Le jour J, les agents étaient heureux d’être là et fiers de dévoiler les réalisations. À ce moment-là, j’ai senti que l’on avait décidément réussi ensemble.
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