Le mémorial de Drancy, lieu de mémoire de la déportation des Juifs

Focus

Mise à jour le 06/11/2023

Vue depuis le mémorial de la Shoah
La cité de la Muette à Drancy (Seine-Saint-Denis) abrite un mémorial dédié à la mémoire des 63 000 Juifs déportés depuis ce camp d’internement, dont plusieurs milliers de Parisiens.
C’est un lieu de mémoire méconnu de nombreux Parisiens. À 12 km de la capitale, le mémorial de la Shoah de Drancy (Seine-Saint-Denis) permet au grand public de plonger dans l’histoire de la cité de la Muette et de découvrir le rôle central de ce camp d’internement dans la déportation des Juifs de France.
80 % des Juifs déportés de France sont partis de Drancy, dont les Juifs habitant Paris et la banlieue. Au total, 63 000 Juifs ont transité par ce camp avant leur déportation vers les camps de la mort. Un voyage sans retour pour l’immense majorité d’entre eux, exterminés dès leur arrivée à Auschwitz en Pologne.

Une cité construite dans les années 1930

Lieu d’histoire et d’éducation ouvert à tous, le Mémorial de la Shoah de Drancy propose une exposition permanente sur l’histoire du camp, des salles pédagogiques, un centre de documentation et une salle de conférences.
D'abord réquisitionnée par les Nazis en 1940 pour y enfermer les prisonniers de guerre français et britanniques, elle est ensuite transformée, d’août 1941 jusqu’à l’été 1944, en camp d’internement, puis de transit, pour les Juifs.
A l’occasion des 90 ans de la construction de la cité et des 80 ans de l’ouverture du camp, l’exposition « Les gratte-ciel oubliés de la Muette (1931-1976) » racontait, jusqu'en mars 2022, son évolution.

Rencontre avec Alix Quéré, coordinatrice en charge des activités pédagogiques à Drancy

Qu’y avait-il à Drancy avant la création du camp de transit ?

La cité de la Muette (E. Beaudouin, A. Lods et Bodiansky, architectes, 1934) utilisée comme camp d'internement  de 1941 à 1944. Drancy (Seine-Saint-Denis).
Le lieu abrite la cité de la Muette construite de 1931 à 1937. Il s’agit d’une cité d’habitations à bon marché (HBM), dont les travaux ont dû s’arrêter avant le début de la Seconde Guerre mondiale faute de financements. La Muette abritait les premiers gratte-ciel de la région parisienne, des tours détruites en 1976 et un bâtiment en « U », qui accueillera le camp de Drancy. La cité est d’abord réquisitionnée par les Allemands en 1940 pour accueillir des prisonniers de guerre français et anglais. Puis Drancy devient un camp d’internement après une série de rafles de Juifs parisiens, notamment du XIe arrondissement en août 1941 par la police française.

Que représente le camp de Drancy pour la déportation des Juifs de France ?

Maquette du camp de Drancy à la cité de la Muette au mémorial de la Shoah
C’est un lieu majeur car le camp est devenu de 1941 à 1944 le lieu principal de déportation des Juifs de France. C’est un lieu-témoin essentiel de la Shoah en France, où des personnes de 56 nationalités différentes ont été internées car désignées comme juives. Il reste aussi un des rares lieux-témoins des camps d’internement dans l'Hexagone car les camps du Loiret de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande n'existent plus.

D’où viennent les personnes internées ?

Ecran interactif au mémorial de la Shoah à Drancy
Au début, la majorité d’entre eux viennent de Paris et de région parisienne du fait de la proximité de Drancy avec la capitale. Puis elles arrivent de toute la France. L’immense majorité n’y reste que quelques jours ou quelques semaines avant leur départ pour Auschwitz.

Quelles étaient les conditions de vie à l’intérieur du camp ?

Les conditions matérielles et psychologiques y étaient extrêmement rudes. L’essentiel des repas se composaient de soupes et jusqu’à 6 000 personnes vont y être internées en simultané dans des grandes chambrées pour 50 à 60 occupants, y compris de nombreux enfants - 10 000 ont transité par Drancy - qui avaient été séparés de leurs parents. Ils se trouvaient dans une situation matérielle et psychologique épouvantable.

Que reste-t-il du camp actuellement ?

La cité de la Muette à Drancy
Dès 1946, les barbelés du camp et les miradors ont été démontés. Mais les logements du bâtiment en « U » ont été conservés et la cité de la Muette, rendue à sa vocation d'habitation dès la fin de la guerre, a été classée Monument historique en 2001. Il y a actuellement environ 500 locataires.

Quelle est la signification du wagon de la mémoire ?

Il s’agit d’un wagon de déportation qui a été installé là en 1980. Il a été placé à l’entrée de l’ancien camp dans une logique mémorielle, pour montrer que la majorité des personnes internées ont été déportées. Les trains partaient depuis les gares du Bourget et de Bobigny. Une statue monumentale, réalisée par Shelomo Selinger, a également été érigée en 1976 à l'entrée de l'ancien camp.

Comment travaillez-vous au mémorial avec le public scolaire ?

Nous accueillons toute l’année des classes d’élèves à partir du CM2. Ce qui les touche particulièrement, c’est de voir les lieux où l’Histoire s’est déroulée, surtout pour ceux qui habitent Drancy.
Un camp dirigé par Aloïs Brunner

En juillet 1943, le nazi Aloïs Brunner, l'un des principaux lieutenants d'Adolph Eichmann, le grand planificateur de la solution finale, prend la direction du camp de Drancy. Il "rationnalise" l'organisation du camp en vue de faire encore mieux marcher la sinistre machine déportation/extermination. Le camp est libéré le 18 août 1944 par les Forces françaises de l’intérieur (FFI) et la Croix-Rouge américaine. Il reste alors 1380 personnes sur place. Brunner, lui, s'est enfui le 17 avec 51 otages juifs du camp. Il ne sera jamais arrêté.

Infos pratiques

Ouvert du dimanche au jeudi de 10 h à 18 h. Gratuit.
Plus d'infos sur les jours de fermeture sur le site du mémorial
Une navette gratuite Paris-Drancy est accessible un dimanche par mois : informations sur les navettes sur le site du mémorial.