Paris, « the favorite city » des souverains britanniques
Le saviez-vous ?
Mise à jour le 22/09/2023
Sommaire
Le nouveau souverain britannique Charles III effectue sa première visite officielle en France du 20 au 22 septembre. Il passe évidemment par Paris, perpétuant ainsi la longue histoire qui, depuis la reine Victoria, lie intimement la couronne anglaise à la capitale française. Retour sur plus d'un siècle de cette cordiale entente.
La tradition des Windsor de réserver à la France, et notamment à Paris, le premier déplacement officiel d'un nouveau souverain britannique en dehors du Royaume-Uni, n'a pas pu être respectée. En mars dernier, en raison des manifestations contre le projet de réforme des retraites, Charles III a dû annuler sa venue dans la capitale française, laissant à la Roumanie et à l'Allemagne la primeur de ses premiers voyages.
Qu'à cela ne tienne, Charles III et son épouse sont finalement sur le territoire national du 20 au 22 septembre. Lors de son
passage dans la capitale, le roi devrait notamment prononcer un discours au Sénat,
se recueillir sur la tombe du Soldat inconnu et visiter le célèbre marché aux
fleurs qui porte le nom de sa mère, la reine Élizabeth II.
Entre la royauté britannique et Paris, c'est une véritable « love story » que Charles III s'emploie à perpétuer. Plus
d’un siècle déjà que tous les aïeuls du nouveau roi ont successivement déclaré leur flamme à la capitale française. Depuis la reine Victoria (1819-1901), pas un seul souverain anglais n'a boudé Paris. Edouard VIII, le roi déchu, y a même élu domicile. Retour en quelques dates sur cette entente très cordiale entre la monarchie britannique et la capitale de la République française.
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Victoria s’agenouille devant le tombeau de Napoléon 1er
Le 18 août 1855, la reine
Victoria arrive à Paris via la gare de l’Est accompagnée par son mari Albert
pour une visite d’état de trois jours. Napoléon III, éperdument anglophile, est enthousiasmé par cette royale visite. Quelques mois plus tôt, c’est lui qui était en
déplacement au Royaume-Uni, et Victoria lui avait promis de venir en France à l’occasion
de l’Exposition universelle qui doit s’ouvrir à Paris.
L’accueil de la
souveraine est très festif. Près de 800 000 personnes sont massées dans
les rues pour voir passer Victoria qui se rend en calèche au château de
Saint-Cloud, où elle loge. Napoléon III met les petits plats dans les grands. La
reine a droit à une réception à l'Hôtel de Ville et à des visites du musée du Louvre et du château de Versailles, où un
grand bal est donné en son honneur dans la Galerie des Glaces. Une majestueuse soirée de gala se tient également à l’opéra.
Surtout, avant de rentrer dans son île, dans un grand
geste remarqué de réconciliation, Victoria ira se recueillir sous la coupole
des Invalides devant le tombeau de Napoléon 1er, l’ancien ennemi
juré de l’Angleterre.
Edouard VII, un roi coquin en goguette à Paris
Le jeune Edouard, prince de Galles et fils aîné de la reine, tombe lui aussi amoureux de Paris. En attendant (très longuement) de succéder à sa mère, le futur Edouard VII se rend fréquemment dans la capitale française qu’il trouve bien moins ennuyeuse que la très rigide Londres victorienne. Il faut dire qu'Edouard est un bon vivant qui aime les plaisirs de la chair. À Paris, il fréquente assidûment les restaurants, les cabarets et surtout… les « maisons de plaisir ». On le surnomme « Dirty Bertie » ou « tum-tum » (gros bide). Son absence de discrétion lors de ses virées fait grincer quelques dents.
Enfin
devenu roi à la mort de Victoria en 1901, Edouard VII n’oublie pas Paris. La raison d’État l'y conduit dès 1903 et il est heureux de retrouver la ville où il avait tant fait bombance. L’Angleterre est à la recherche d’un allié puissant et songe à la France. Mais la partie n’est pas gagnée, car la IIIe République française a pris le parti des Boers, ces Sud-Africains d’origine néerlandaise en rébellion contre l’occupation anglaise dans l’extrême sud de l’Afrique, lors d’une guerre sanglante achevée en 1902.
La visite d’Edouard VII débute donc très mal. Il est hué par le peuple parisien et assiste dans une ambiance très tendue à une représentation théâtrale à la Comédie-Française. Idem le lendemain : le climat est glacial quand il se rend à l’Opéra. Mais, progressivement, ses manières simples et sa jovialité le rendent sympathique. Le roi inverse
totalement la tendance. Ce rusé diplomate arrive même à ses fins en signant en
1904 avec la France « l’Entente cordiale ». Et Paris a rendu hommage
à ce roi « fêtard » en lui dédiant tout un quartier à deux pas de l’opéra Garnier, où l’on peut trouver une rue (percée en 1911), une place et un théâtre Édouard VII.
George V, des visites marquées par la guerre
Le fils d’Edouard VII, devenu
roi en 1910, est en visite à Paris le 21 avril 1914 pour renforcer les liens
avec la France, alors que la menace de la guerre se précise.
George V arrive avec son
épouse Mary et reçoit de très chaleureuses ovations du peuple parisien sur les
Champs-Élysées, pavoisés aux couleurs de l’Union Jack (le drapeau britannique)
pour l’occasion. Un grand dîner d’État est donné à l’Élysée en l’honneur du roi
par le président Raymond Poincaré.
George V reviendra à Paris en novembre 1918, au lendemain de l‘armistice, toujours accompagné de la reine Mary. Une fois encore, les Parisiens
ovationnent le roi. Le souverain est reçu à l’Hôtel de
Ville et une grande réception est organisée à l’ambassade d’Angleterre. Paris n’oubliera
pas George V, ce fidèle allié durant la Première Guerre mondiale. Une station
de métro portera son nom, ainsi qu’une avenue et un palace dans le 8e arrondissement.
Paris, le dernier refuge d’Edouard VIII
George V décède le 20 janvier 1936. Selon les règles de succession, il
revient à son fils aîné Edouard de monter sur le trône. Il devient ainsi Edouard VIII. Mais son règne est éphémère… 326 jours. Edouard est amoureux d’une
Américaine divorcée, remariée et de nouveau en instance de divorce. Il compte
bien l’épouser dès que possible. Ce que les autorités religieuses, royales et gouvernementales britanniques refusent.
Aucun arrangement n’étant trouvé – il est vrai aussi que les sympathies envers l'Allemagne hitlérienne du souverain n'ont pas aidé à trouver un compromis –, Edouard VIII
abdique le 10 décembre 1936. Il quitte l’Angleterre pour la France où il épouse
Wally Simpson en juin 1937. Le couple, devenu duc et duchesse de Windsor, s’installe dans
un hôtel particulier dans le 16e arrondissement près du boulevard
Suchet, où il résidera (sauf durant la Seconde Guerre mondiale) jusqu’en 1953.
Cette année-là, la Ville de Paris propose au couple Windsor de déménager vers une splendide demeure à l’orée du bois de Boulogne, à proximité de Neuilly-sur-Seine. De grandes soirées mondaines y sont données. Le duc et la duchesse de Windsor font partie du Tout-Paris, fréquentent les salons de l’hôtel Raphaël, le restaurant Maxim’s, l’Opéra, sont présents aux défilés des grands couturiers…
Le duc s’éteint en 1972 – Élizabeth II viendra à son chevet – et la duchesse en 1986. En 2023, le Conseil de Paris a confié à la Fondation Mansart le soin de réhabiliter totalement ce que l'on appelle aujourd'hui la « villa Windsor ». Coût des travaux : 8,7 millions d’euros, entièrement pris en charge par du mécénat privé. L'ouverture au public est prévue en 2024.
George VI et Elizabeth, un couple glamour à Paris
Albert,
frère cadet d’Edouard VIII, succède à son aîné sur le trône fin 1936 sous le nom
de George VI.
Il
se rend à Paris dès juillet 1938, en compagnie de sa femme Élizabeth, à l’invitation
du président de la République Albert Lebrun. Durant quatre jours, tout n’est
que fastes, fêtes et glamour. C’est par la Seine, en provenance du quai d’Orsay
où il loge, que le couple royal se rend à l’Hôtel de Ville, où les attend le président
Lebrun. Une somptueuse garden-party est organisée dans les jardins de Bagatelle
du bois de Boulogne. Le souverain se rend aussi au palais Garnier.
Le peuple de
Paris fait un accueil enthousiaste à ce jeune couple, les rues sont bondées
pour leur passage. Surtout, alors que des bruits de bottes se font entendre
outre-Rhin, le roi George VI rappelle l’immuable amitié qui lie les deux
peuples français et britannique.
Elizabeth II et sa « love story » avec Paris
Parmi les Windsor, c’est incontestablement Elizabeth II qui eut la relation
la plus étroite avec Paris. La souveraine s’est rendue à six reprises dans la
capitale. Une fois en tant que princesse (en 1948) – ou elle alla dans des
cabarets – et cinq fois comme reine durant ses
70 ans de règne (1957, 1972, 1984, 2004 et 2014). La mère de Charles III aura
connu tous les présidents de la IVe et
de la Ve République
française. Chacune de ses visites était une fête.
Outre la visite de monuments, elle aimait aussi déambuler dans les rues parisiennes.
Ainsi cette pérégrination rue Montorgueil en 2004, qui mis la police sur les
nerfs… Mais l’endroit favori de la défunte reine reste le vieux marché aux
fleurs de l’île de la Cité. Tant et si bien qu’en 2014, lors de sa dernière
visite parisienne, elle eut le bonheur d’inaugurer une plaque « Marché
aux fleurs Reine Elisabeth II », car le lieu porte désormais son nom. Elle
y était venue pour la première fois 66 ans plus tôt alors qu’elle n’était qu’une jeune princesse. Et c’est également sur ce site que se rendra son fils
Charles III. Sorte d’hommage à sa très parisienne de mère.
Des souverains… mais pas que
Dans la famille royale britannique, il n’y a pas que
les souverains à se rendre dans la capitale française. Nombreux sont les
princes et princesses à faire une escapade sur les bords de la Seine. Charles,
lui-même, alors prince de Galles, est déjà venu notamment en 1981, en 2017, puis en 2020, accompagné de Camilla, future reine consort. Cette année-là, un dîner
présidentiel fut donné en leur honneur à l’Élysée par le président Emmanuel
Macron.
William, fils aîné de Charles et héritier du
trône, a fait le déplacement en 2017 avec
son épouse Kate. Au menu : visite de la tour Eiffel, des Tuileries et une entrevue
avec le président François Hollande.
Enfin, comment ne pas conclure cette « story » sans évoquer la triste fin de Diana, princesse de Galles, ancienne épouse de
Charles, dans la nuit du 30 au 31 août 1997. Partie de l’hôtel Ritz place Vendôme, la voiture dans laquelle elle a
pris place fonce à toute allure pour semer les paparazzis. Mais son chauffeur
roule beaucoup trop vite. Le véhicule s’encastre dans le septième pilier du
tunnel de l’Alma (8e arrondissement). La princesse décède peu après.
Depuis, chaque année, pour l’anniversaire de la mort de Diana, des milliers
d’anonymes déposent des fleurs au pied de la statue de la Flamme de la
Liberté située sur le tunnel.
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