« Paris, un musée à ciel ouvert » : les statues royales
Série
Mise à jour le 02/02/2022
Sommaire
Avec près de 1000 œuvres dans l'espace public, dont de nombreuses statues, Paris regorge de témoignages de notre histoire. Notre série « Paris, un musée à ciel ouvert » vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui ont marqué la capitale. Place aux têtes couronnées.
Bien qu’ayant profondément marqué
la capitale, peu de monarques ont été célébrés dans l’espace public. La République a préféré rendre hommage à ses grands héros. Seule une poignée de
monuments rappelle aujourd’hui les souverains qui ont marqué l’histoire de
France.
Fruit en grande partie de la statuomanie de la troisième République, la statuaire publique ne consacre qu’une part congrue à la célébration des grands monarques ayant
marqué l’histoire de France. Ainsi, depuis la Révolution, seuls six monuments
ont été érigés dans l’espace public parisien en l’honneur de souverains, dont
la moitié en remplacement de statues fondues en 1792. Et il n’est pas anodin
qu’à l’exception de Charlemagne et ses Leudes, toutes ont été installées
sous la Restauration et la Monarchie de Juillet, en mal de légitimité.
Une cartographie interactive
Découvrez sur une cartographie interactive près de 500 sculptures appartenant à la Ville de Paris ou confiées à sa gestion par l’État, dans le cadre de dépôts par le Centre National des Arts Plastiques (CNAP). Cette cartographie sera au fur et à mesure enrichie, afin de présenter chaque statue dans le détail.
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Charlemagne (742-814)
Charlemagne conduit par
Olivier et Roland ou Charlemagne et ses Leudes
Louis Rochet (1813-1878), Charles Rochet (1819-1900)
1877, bronze
Lieu : Parvis de Notre-Dame - Jardin de la place Jean-Paul II (4e)
Louis Rochet (1813-1878), Charles Rochet (1819-1900)
1877, bronze
Lieu : Parvis de Notre-Dame - Jardin de la place Jean-Paul II (4e)
Charlemagne est à cheval, couronné, vêtu de
cotte de mailles et couvert du manteau impérial. De chaque côté de son
destrier, Roland et Olivier, la tête fièrement relevée et le regard plein
d'orgueil, tiennent l’animal en bride.
Cette œuvre est due aux frères Louis et
Charles Rochet, qui s'y attellent après que Louis a acquis sa réputation avec
une statue de Guillaume le Conquérant
à Falaise, et celle de L'empereur du
Brésil Pierre Ier à Rio de Janeiro.
Proposée en plâtre à l'Exposition universelle de
1867, puis en bronze à celle de 1878, la fonderie Thiébaut Frères (d’où proviennent
les 16 tonnes de bronze de la statue) trouve un stratagème afin de mettre
l'œuvre en valeur. Elle propose de l'installer à ses frais pour une durée de
trois ans, en espérant que la municipalité parisienne finisse par l'acheter.
Exaltation de l’image impériale sous le Second
Empire (1852-1870), le groupe continue d’impressionner comme réussite majeure de
la fonderie d’art parisienne sous la République naissante. Même si certaines
personnalités politiques émettent alors des réserves, estimant que Charlemagne
était un tyran, une figure antirépublicaine, la statue est malgré tout
inaugurée le 14 juillet 1882, et acquise par la ville en 1896.
Les frères Rochet reproduisent fidèlement des
modèles supposés originaux, comme l’épée Durandal du musée de Madrid, armant
Roland, ou la couronne de Nuremberg, coiffant Charlemagne et conservée à Vienne,
même si elle est anachronique dans la composition. En effet, Charlemagne n’a
pas pu connaître cette couronne, qui coiffa les souverains du
Saint-Empire-Romain-Germanique seulement à partir de la fin du Xe siècle.
En ajoutant les deux figures en pied
d’écuyers, Roland et Olivier, les frères Rochet enrichissent la forme
traditionnelle du groupe équestre en multipliant les axes de composition et les
points de vue, entre l’ancien palais royal et la cathédrale Notre-Dame, au cœur
de l’île de la Cité.
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Philippe Auguste (1165-1223) et Saint-Louis (1226-1270)
Philippe Auguste
Auguste Dumont (1801-1884)
1843, fondu à la cire perdue par Calla
Auguste Dumont (1801-1884)
1843, fondu à la cire perdue par Calla
Saint Louis
Antoine Etex (1808-1888)
1842, fondu à la cire perdue par Calla
Lieu : place de la Nation (12e)
Antoine Etex (1808-1888)
1842, fondu à la cire perdue par Calla
Lieu : place de la Nation (12e)
Juchées à une
trentaine de mètres de haut, deux silhouettes drapées et couronnées, celles des
souverains capétiens Philippe Auguste et Louis IX dit Saint Louis, toisent
l’horizon.
Alors que la place de la Nation était encore la place du
Trône, le grand architecte Claude-Nicolas Ledoux fait édifier en 1787, à sa
jonction avec le cours de Vincennes, la barrière du trône destinée à faciliter
la perception de l’octroi, un impôt appliqué à certaines marchandises entrant
dans la ville. Outre une grande grille et deux guérites, deux colonnes
complètent le monumental ensemble, qui reste inachevé alors qu’éclate la
Révolution.
Philippe Auguste et Saint-Louis accueillent les visiteurs à l'entrée de Paris
Ce n’est qu’à partir de 1842, sous le règne de Louis
Philippe, que les colonnes sont restaurées puis ornées de statues de souverains de plus de 3 mètres.
Elles regardent vers Vincennes, dont le château a justement été transformé en
résidence royale par Philippe Auguste et où, dans l’histoire traditionnelle,
saint Louis est représenté rendant la justice sous son chêne. Ces rois, avec
notamment la forteresse du Louvre pour Philippe Auguste et la Sainte-Chapelle
pour saint Louis ont marqué Paris et incarnent ce Moyen Âge que savants,
écrivains et artistes redécouvrent alors avec passion.
Les statuaires, Antoine
Etex, qui avait sculpté quelques années plus tôt deux reliefs pour l’arc de
triomphe de l’Étoile, et Augustin Dumont, qui était l’auteur du Génie de la liberté sur la colonne de
Juillet, vont tenter d’être fidèles à cette histoire en soignant les détails,
malgré la hauteur des colonnes. Ainsi, couronne, épée, cotte de mailles et écu
fleurdelisé sont détaillés dans le bronze.
Ces portraits royaux se répondent dans une composition
inversée : Philippe Auguste brandit son arme tandis que saint Louis
s’appuie sur la sienne. Ils accueillent tous ceux se dirigeant vers Paris et
ornent ainsi la plus monumentale des entrées de la capitale.
Henri IV (1553-1610)
Henri
IV
François-Frédéric LEMOT (1772-1827)
Achevée en octobre 1817, bronze,
Dépôt de l’État depuis 1818 inv. FNAC PFH-6970
Lieu : Place du Pont Neuf (1er)
François-Frédéric LEMOT (1772-1827)
Achevée en octobre 1817, bronze,
Dépôt de l’État depuis 1818 inv. FNAC PFH-6970
Lieu : Place du Pont Neuf (1er)
En 1604, la reine Marie de Médicis décida de faire élever un monument en l’honneur de son époux le roi Henri IV. C’était la première fois qu’une statue équestre d’un souverain était commandée de son vivant. Le projet comprenait également la création de l‘élégante place Dauphine. D’origine florentine, la reine préféra passer commande à des artistes italiens, Jean de Bologne (1529-1608) et Pietro Tacca (1577-1640). Le temps que l’œuvre soit réalisée et arrive à Paris en 1614, Henri IV était déjà mort. Elle fut complétée par Pierre Franqueville (1548-1615) et Francesco Bordoni (1580 ?-1654) de quatre captifs aux angles du socle.
Le « Bon roi » ne résiste pas à la Révolution
Au moment de la Révolution, tout ce qui rappelait la royauté était systématiquement détruit et, bien que particulièrement aimé des Français, le monument du « Bon roi » subit le même sort : la statue fut détruite puis fondue en 1792, mais pas le décor du socle (conservé au musée du Louvre).
Au retour de la Monarchie en 1814, un nouveau monument équestre fut commandé à François-Frédéric Lemot (1771-1827) et l’inauguration, grandiose et festive, véritable moment de propagande royale, eut lieu le 25 août 1818, jour de la saint Louis.
Mais l’épisode le plus célèbre
reste sans conteste l’arrivée de cette nouvelle statue : elle fut tirée
par des bœufs depuis les ateliers du Roule, où elle avait été exécutée avec le
bronze de la colonne de Napoléon Ier à Boulogne-sur-Mer et la statue
de Desaix anciennement place des Victoires. Spontanément, le peuple parisien se
substitua aux bœufs pour un trajet de 6 km qui dura 3 jours ! La dernière
partie fut assurée par 60 chevaux. Ainsi le monument, emblème du paysage
parisien, retrouvait sa place… mais il n’avait pas fini de livrer ses
secrets ! Sa restauration en 2004 a permis de découvrir 7 boîtes scellées de
plomb placées à l’intérieur du cheval, contenant d’importants documents
d’archives.
Louis XIII (1610-1643)
Louis
XIII
Charles Dupaty (1771-1825), Jean-Pierre Cortot (1787-1843)
1825, marbre
Lieu : Square Louis XIII – Place des Vosges (ancienne place Royale) (4e)
Charles Dupaty (1771-1825), Jean-Pierre Cortot (1787-1843)
1825, marbre
Lieu : Square Louis XIII – Place des Vosges (ancienne place Royale) (4e)
Dépôt de l’État à la Ville de Paris/ inv. FNAC PFH-6960
Fils de Henri IV et de Marie de Médicis,
Louis XIII devient roi de France en 1610. Sa mère assure la régence du royaume
jusqu’au coup de force du jeune monarque, le 24 avril 1617. Il assoit alors son
pouvoir, avec l’aide de son ministre le cardinal de Richelieu.
Dès lors, la politique du
royaume se déploie avec l'affaiblissement des grands féodaux, la lutte contre
les Protestants et l'affirmation de la domination militaire française en Europe pendant
la guerre de Trente
Ans.
Passionné par les chevaux
et par les armes, excellent cavalier, le roi se trouve fréquemment sur les
champs de bataille. L’artiste a choisi ici de le représenter en empereur romain,
couronné de laurier et vêtu d’une toge. Chevauchant sans étrier, il tient les
rênes et lève son bras droit d’un geste de commandement.
Cette statue en marbre,
dont le modèle est dû à Charles Dupaty (1816), a été sculptée par Jean-Pierre
Cortot en 1821. Elle remplace un ancien portrait équestre en bronze,
réalisé par Pierre II Biard en 1639. Commandé
par Richelieu, il occupait le centre de l’ancienne Place royale, inaugurée à
l’occasion des fêtes de fiançailles de Louis XIII avec l’infante d’Espagne.
En 1792, la statue en bronze
est fondue pour la réalisation de canons en faveur de la jeune République. Avec le retour de la monarchie en 1815, un
nouveau portrait est commandé. Le recours au marbre, dont les propriétés
structurelles sont différentes de celles du bronze, contraint les sculpteurs à placer
un tronc d'arbre sous le ventre du cheval pour la stabilité de l’œuvre.
La statue est inaugurée en
1829, encadrée de 4 fontaines, par Cortot également.
Louis XIV (1638-1715)
Louis XIV
François-Joseph BOSIO (1768-1845), Auguste CARBONNAUX (1790-1843), fondeur
1822, bronze
Lieu : Place des Victoires (1er)
Dépôt de l’État depuis 1828. Inv. FNAC PFH-6961
François-Joseph BOSIO (1768-1845), Auguste CARBONNAUX (1790-1843), fondeur
1822, bronze
Lieu : Place des Victoires (1er)
Dépôt de l’État depuis 1828. Inv. FNAC PFH-6961
Paris voit, au tout début du XVIIe siècle, la naissance d’un
nouveau modèle urbanistique de place ordonnancée avec la création quasi
simultanée de l’actuelle place des Vosges et de la place Dauphine.
Très vite, ces nouvelles places vont servir d’écrins aux représentations
des souverains, leur aménagement même devenant subordonné à l’implantation de
l’effigie royale.
Née en 1685 de l’initiative conjuguée des Bâtiments du Roi,
de la Ville de Paris et du maréchal de la Feuillade, la place des Victoires est
ainsi dès l’origine destinée à mettre en valeur la statue de Louis XIV que le
maréchal venait de commander à Martin Desjardins (1637-1694). Éclairée initialement
par quatre fanaux, la figure du Roi-Soleil y était ainsi magnifiée par l’architecture
conçue spécialement par Jules Hardouin-Mansart (1646-1708).
Comme la plupart des effigies royales, l’œuvre de Desjardins
est fondue à la Révolution qui ne conserve que les figures des captifs et les
bas-reliefs qui ornaient le socle, aujourd’hui exposés au musée du Louvre.
C’est en 1819 que Louis XVIII commande une nouvelle
représentation de son aïeul à François-Joseph Bosio (1768-1845), élève
d’Augustin Pajou (1730-1809), qui avait pourtant été l’un des principaux
sculpteurs de l’Empire. S’éloignant de la statue de Desjardins, où le roi
soleil était représenté debout, en habit de sacre, vainqueur serein de la Grande
Alliance, Bosio montre, lui, un Louis XIV conquérant, monté sur un cheval cabré
tel un empereur romain, suivant le modèle défini par Étienne Falconet (1716-1791)
dans son monument à Pierre le Grand (Saint-Pétersbourg, 1782). Pour les
bas-reliefs du socle, Bosio reprend en revanche l’un des thèmes déjà illustrés
dans le monument de Desjardins : Le Passage du Rhin, auquel répond L’Institution
de l’ordre de l’ordre de Saint-Louis.
La fonte en est confiée à Auguste Carbonnaux (1790-1843),
l’un des premiers à développer la technique de la fonte au sable. Le monument
est inauguré le 15 août 1822.
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