Sous le prisme de sa propre histoire, Annie Ernaux (Prix Nobel de littérature 2022) retrace le parcours bouleversant d’une jeune femme qui, contrainte de dissimuler sa grossesse, l’avortement étant alors interdit, se lance dans la quête désespérée d’une « faiseuse d’anges ».
À l’heure où ce droit fondamental est reconsidéré dans de nombreux pays, Marianne Basler donne la voix à ce texte essentiel dans une adaptation poignante et organique.
Une chaise et une table pour unique décor. Du noir, de la tête aux pieds. Des gestes précis, simples, épurés. Sur la scène du Théâtre de l’Atelier (18e), la comédienne Marianne Basler fait le choix de la sobriété pour se mettre au service du récit puissant d’Annie Ernaux. Celui qui relate son douloureux avortement pratiqué en 1963, à une époque où cet acte était encore interdit.
Ce seule-en-scène rappelle, avec brutalité, les conditions extrêmement dangereuses dans lesquelles les femmes confiaient leur corps à celles que l’on appelait les « faiseuses d’anges ». La honte, les doutes, la peur, le silence, l’humiliation, le jugement, les mots de l’autrice, projetés à l’assemblée comme un cri de colère, trouvent un écho particulier ce soir-là, à l’heure où ce droit fondamental est plus que jamais menacé.
Ils claquent, frappent, heurtent et secouent : dans la grande salle habillée de velours rouge, le public retient son souffle, les poils dressés, les poings serrés, la gorge nouée. Merci pour ce beau moment de théâtre.
