Évènement

Formes de vies : un nouveau regard sur le social

Le mercredi 22 janvier 2025
Une table ronde autour de la notion de « forme de vie » qui renouvelle la manière de penser le social
Depuis la parution de Life and Words de Veena Das en 2006 (La Vie et les Mots, Éditions du Cerf, 2023) un dialogue fécond entre la philosophie et l’anthropologie autour de la notion de « forme de vie » renouvelle la manière de penser le social. La notion de « vie sociale » insiste sur le rôle structurant de l’ordre social qui stabilise l’existence collective. Par contraste, la description de la diversité des « formes de vie » rend plus attentif à la fragilité de ces règles et la vulnérabilité des vies humaines qui en découle.
Cette table ronde vise à expliquer comment cette théorisation contemporaine aide à mieux appréhender la vie en société, en particulier dans ses dimensions les plus ordinaires. Elle réunit Estelle Ferrarese et Sandra Laugier, éditrices scientifiques de l’ouvrage Formes de vie (CNRS Éditions, 2019), Perig Pitrou, auteur de Ce que les humains font avec la vie (Puf, 2024) et Richard Rechtman, auteur de Vie ordinaire des génocidaires (CNRS Éditions, 2021).

À propos des intervenant.e.s

Estelle Ferrarese est professeure de philosophie morale et politique à l’Université de Picardie Jules Verne, et membre Senior de l’Institut Universitaire de France. Elle dirige l’International Research Network « Norms of Life » du CNRS.
Sandra Laugier est professeure de philosophie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle dirige le projet européen ERC DEMOSERIES.
Perig Pitrou est directeur de recherche au CNRS à la Maison Française d’Oxford et au Laboratoire d’anthropologie sociale du Collège de France /Université PSL où il dirige l’équipe « Anthropologie de la vie ».
Richard Rechtman est anthropologue et psychiatre, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS).

À propos des ouvrages

Formes de vie

La notion de « formes de vie » a émergé il y a une dizaine d’années et circule dans des domaines variés, de la biologie à la philosophie en passant par la sociologie, la science politique et l’anthropologie. Mais qu’entendre par « formes de vie » ? Un ensemble de pratiques, d’usages de nature variée, qui donnent à la vie commune des caractères propres, pour ainsi dire diffus, explicitement ou implicitement présents dans les croyances, la langue, les institutions, les modes d’action, les valeurs. Une forme de vie est toujours, en ce sens, particulière, c’est pourquoi il existe des formes de vie, plus qu’une forme de vie.
De l’étude de ses divers sens chez des auteurs aussi différents qu’Adorno et Wittgenstein à sa portée critique et politique et à ses incidences éthiques, cet ouvrage déploie toutes les dimensions de cette nouvelle approche. En particulier, la porosité entre les sphères privée, sociale, économique et politique, et la nouvelle articulation du social et du biologique.

Ce que font les humains avec la vie

Comment coexister avec le vivant dans des environnements écologiques toujours plus dégradés ? Comment construire des conditions de vie atténuant les inégalités entre les vies humaines et favorisant une meilleure qualité de vie ? Comment faire un usage responsable des biotechnologies ? Comment faire coha­biter la diversité des rapports au monde développés par les sociétés humaines, en prenant en compte leurs attachements à des milieux de vie variés ? Ces quatre questions, étroitement liées, s’articulent à une interrogation centrale pour notre époque : comment vivre sur la planète Terre ?
À l’interface entre le vital et le social, ces enjeux ne concernent pas seulement les sciences comme l’écologie et la biologie. Ils sont au cœur de la réflexion dans un domaine en pleine effervescence : l’anthropologie de la vie. Partout dans le monde, les humains perçoivent la vie comme un pouvoir qui exerce son emprise sur les êtres vivants, produisant des effets – croissance, reproduction, vieillissement, mort – sur les corps. Dans une perspective comparatiste, ce livre met en lumière la manière dont les enquêtes ethnographiques aident à mieux comprendre comment les sociétés s’organisent autour d’un tel pouvoir et de la fragilité des vies humaines qui en dépend.

La vie et les mots

Comment la violence, cette force destructrice qui semble aussi puissante que fulgurante, s’invite-t-elle peu à peu jusque dans notre existence quotidienne ?
C’est en spécialiste que l’anthropologue Veena Das analyse l’irruption de la violence extrême dans la vie ordinaire, notamment celle des femmes, en s’appuyant sur l’exemple de la partition de l’Inde et du Pakistan en 1947 ou des massacres de sikhs ayant suivi l’assassinat de la Première ministre Indira Gandhi en 1984.
Elle dévoile ainsi les différents mécanismes à l’oeuvre, qui combinent violence collective, influence de la rumeur, nouveaux liens familiaux et rôle des autorités. Articulant réflexions ethnographiques et philosophiques, elle esquisse dans cet essai magistral une nouvelle façon de décrire et d’interpréter la violence dans les sociétés et cultures du monde entier.
Un ouvrage indispensable, au-delà des frontières disciplinaires, pour mieux comprendre la violence, en particulier celle perpétrée contre les femmes.

La vie ordinaire des génocidaires

Paris, 2015 : le terrorisme djihadiste touche massivement la capitale française et fait près de 150 morts. Pour qualifier les auteurs de ces meurtres, on parle tantôt d’hommes radicalisés soumis à une idéologie, tantôt d’hommes médiocres, « banaux », qui ne font qu’obéir aux ordres, tantôt de monstres assoiffés de sang. Comme pour les tueurs de masse des plus grands crimes de l’histoire contemporaine, on se demande sans cesse qui sont ces hommes capables de tuer ainsi à la chaîne. Qu’éprouvent-ils dans leur conscience ? Ne ressentent-ils pas l’horreur de leurs actes ? N’ont-ils pas de la compassion pour leurs victimes ?
Pour Richard Rechtman, ce ne sont pas les idéologies qui tuent, mais bien les hommes. Ceux-ci s’en chargent avec une grande facilité, et tuent simplement comme d’autres vont au travail. Ce livre effectue une véritable descente dans la vie ordinaire des petits exécutants, des génocidaires. Il sonde le quotidien dans lequel les hommes s’accommodent d’exécuter chaque jour des dizaines d’individus. Il montre que ce n’est pas le fait de tuer qui occupe l’essentiel de leurs pensées, mais plus simplement leur vie quotidienne. Ils tuent comme ils s’attelleraient à n’importe quel métier, c’est-à-dire de façon ordinaire. Car ce ne sont pas les plus motivés ou les plus sadiques, ni même les plus endoctrinés, qui tuent avec une telle facilité, ce sont avant tout les hommes les plus disponibles.
L’objet de ce livre n’est donc pas de savoir qui sont ces exécuteurs ni au nom de quoi ils tuent, mais de montrer comment dans certains contextes, exécuter d’autres hommes constitue la vie ordinaire de tueurs anonymes.

Mise à jour le 14/01/2025

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