Rencontre avec Jean-Marc Léri, historien du Paris mystérieux
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Mise à jour le 28/11/2017
Sommaire
C'est lors d'une froide nuit de novembre, que nous avons pénétré un musée secret de la capitale. Jean-Marc Léri nous y attendait pour présenter son nouveau livre, «Paris Mystères». Après plus de 40 ans de recherches, il y dresse un état des lieux des plus grands mystères de Paris, et livre les hypothèses les plus probables de ces "cold cases" historiques.
C'est un homme à l’œil malicieux et la moustache souriante qui nous accueille au 4, rue de l'Observatoire. Du haut de l'escalier, il nous lance: «Connaissez-vous la différence entre un poison et un médicament? Le dosage bien entendu!»
Un amoureux de l'histoire de Paris
Cet homme, c'est Jean-Marc Léri. Il a été Président de la Société de l’Histoire de Paris, directeur des Archives et des bibliothèques du Louvre et des musées nationaux, directeur du musée Carnavalet pendant plus de 20 ans et directeur de la crypte archéologique de l'Ile de la Cité et des Catacombes. C'est dire s'il en connait un rayon sur l'histoire de Paris.
Dans son nouveau livre (qui se décline aussi en programmes télé), il propose six carnets sur les mystères de Paris. Et tente de répondre le plus précisément possible aux questions que les Parisien.ne.s féru.e.s d'histoire se posent depuis toujours. L'alchimiste parisien Nicolas Flamel a-t-il réussi à changer le mercure en or, sinon d'où lui vient son incroyable et subite fortune? Où se cache le trésor des Templiers? Le Fantôme de l'Opéra a-t-il vraiment existé? Allan Kardec a-t-il vraiment trouvé un passage pour communiquer avec les morts? Comment la mystérieuse Marquise de Brinvilliers a-t-elle empoisonné toute sa famille?
Nous sommes justement au bon endroit pour répondre à cette dernière question. Autour de nous des milliers de bocaux renferment plantes et produits en tout genre. «Bienvenue au musée de la Pharmacie!», nous lance notre hôte. De vieilles vitrines de plusieurs mètres de haut nous entourent, tandis qu'au centre de la pièce trône un magnifique meuble pagode datant de l'Exposition universelle de 1889… L'endroit est fascinant, on se croirait presque à Poudlard, l'école des sorciers de Harry Potter.
Le musée François Tillequin
Ce musée possède l'une des plus importantes collections médicales au monde, et contient environ 25.000 échantillons d’origine essentiellement végétale, mais aussi quelques produits d’origine animale. Les plus emblématiques sur le plan thérapeutique sont accompagnés de nombreux objets, souvent insolites, illustrant leur récolte, leur transport et leur emploi. Boissons, huiles ou parfums, drogues et poisons, c'est toute l'histoire de l'humanité que l'on voit défiler en parcourant ces collections vieilles de deux siècles.
Quelques trouvailles étonnantes…
Mais revenons-en à la Marquise, quel produit a-telle utilisé? «Ce qui était très à la mode au XVIIe, c’était le chlorure mercurique (le sublimé corrosif), c’était le poison préféré de la Marquise de Brinvillier, c’est avec cela qu’elle a tué son père, ses deux frères, hélas elle a raté son mari», sourit M. Léri. «On le versait dans la nourriture, dans l’eau ou le vin (qui masquait les saveurs) ou dans le bouillon. Avec l'aide de son domestique et de son amant, elle a supprimé tout le monde.» La Marquise le paie de sa vie puisqu'elle sera jugée et décapitée place de Grève en 1676.
«Connaissez vous l'aphrodisiaque que l'on utilisait dans le temps?» L'historien nous présente alors un bocal rempli de mouches vertes. «En réalité ce ne sont pas des mouches mais des coléoptères, avec une belle couleur verte. Leur contact avec la peau est très mauvais. Il provoque l’apparition de pustules et de cloques, c’est dangereux à manipuler. Pour obtenir l’effet, on le mettait en poudre et on l’ingérait par voie orale. Au moment où ça pénétrait au niveau de la vessie, ça provoquait une irritation extrêmement violente de l’urètre. Cela provoquait alors une érection douloureuse et durable, mais aussi des urines sanguinolentes. C’était un des rares aphrodisiaques efficaces», nous raconte-t-il avec humour.
Des anecdotes comme celle-ci, on en trouve des dizaines dans les carnets de Jean-Marc Léri.
Mais certains mystères restent entiers
«Ce qui est le plus mystérieux dans Paris ce sont ses origines, que l'on croit être sur l’île de la Cité. Alors que c’est impossible! On ne sait toujours pas où était Lutèce.»
L'auteur se demande surtout comment Paris a pu se maintenir si longtemps comme l'une des plus belles villes du monde. «Ça, c’est tout à fait extraordinaire, ce n’est d’ailleurs pas un mystère mais un miracle. On a eu la chance de ne pas avoir de grand incendie ni de tremblement de terre, il n’y a pas eu ce qui a pu détruire les autres grandes capitales européennes. Puis, au XIXe siècle, il y a eu le souci d’uniformiser ou plutôt de classifier les choses, les couleurs des immeubles en pierre de Saint-Leu, des trottoirs gris foncé, des mobiliers urbains, des enseignes peintes, tout cela crée une unité qui donne envie de se perdre. Autre miracle, la Seine n'est pas une grande rivière mais un petit fleuve, on passe facilement d’une rive à l’autre pour s’y promener, les deux sont extraordinaires. Peut-être qu’un jour, quand on aura supprimé la muraille que forme le périphérique, on découvrira que la banlieue a beaucoup à nous montrer.»
En bref
Pour trouver le livre Paris Mystères aux éditions Bayard, rendez-vous dans toutes les bonnes librairies ou ici!
Le musée François Tillequin est entretenu par des bénévoles et ouvert au public pendant les journées du Patrimoine. Pour le soutenir, vous pouvez faire un don via la Fondation de Paris Descartes.
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