Évènement

« Mémoire de fille » d'après Annie Ernaux au théâtre le Chariot

Du mercredi 23 octobre au samedi 2 novembre 2024
photo d'une femme en maillot de bain
« A dix-sept ans, je me suis retrouvée dans un lit avec un garçon toute une nuit. Il y a une expression pour dire exactement la force et la stupeur de l’événement, ne pas en revenir. Au sens exact du terme, je n’en suis jamais revenue, je ne me suis jamais relevée de ce lit », écrivait ainsi Annie Ernaux en 2005.
Annie Ernaux décide 50 ans après ce traumatisme d'écrire sur la jeune fille qu'elle a été afin de questionner chaque étape de sa vie, et de s'en affranchir… La femme d’aujourd’hui, incarnée par Violette Campo, observe «la fille de 58» qu’elle a été, interprétée par sa fille, Lisa Garcia. Le «je» du présent recherchant dans ce «elle» du passé…
« d’après Mémoire de fille d’Annie Ernaux, © Editions Gallimard »
mise en scène Violette Campo​
distribution Violette Campo, Lisa Garcia
direction d'acteur Agnès Claverie
lumières Laurent Paris
scénographie Jessica Ruiz
La Compagnie Théâtre Les Pieds dans l’Eau

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Note de mise en scène

Violette Campo

Ce texte m’a énormément touché. Il parle du désir et du consentement des femmes, de notre capacité ou incapacité à se défaire de notre conditionnement, de notre éducation, et de nos origines sociales… Je suis née en 1954, dans un milieu social ouvrier et j’ai vu mes sœurs subir ce que Annie Ernaux raconte…, la peur des hommes, la honte d’être une fille-mère… et bien sûr, cette espèce de soumission à l’homme, non dite, mais très présente… Je recevais en même temps que mes sœurs cette éducation imposée par notre mère, et il a fallu mai 68, les mouvements féministes, et la pilule pour oser petit à petit sortir de ces injonctions… Pourtant, la liberté des femmes dans leur choix n’est certainement pas acquise, et reconnue, l’actualité nous en donne tous les jours des exemples affligeants… C’est pourquoi ce texte résonne très fortement aujourd’hui ! Nous avons pu le constater lors de lectures faites dans des lycées, et auprès du public adulte ; les réactions émues de chacun, quel que soit leur âge étaient très fortes. Toutes ces raisons ont fait, que j’ai tout de suite eu envie de porter ce texte, à la scène ! Et de le jouer avec ma fille, comédienne. Elle jouant « la fille de 58 » et moi, sa mère, jouant la « femme d’aujourd’hui »…
Cette filiation, en effet, permet de traduire efficacement sur scène l’écriture de ce texte : Elle, « la fille de 58 », interprétée par une personne jeune permet, de saisir sans complaisance, le côté juvénile, « tout en elle est désir et orgueil » et la brutalité de l’acte sexuel qu’elle subit. D’autre part, la femme d’aujourd’hui, interprétée par une femme âgée, qui cherche par l’écriture, six décennies plus tard, à construire ou déconstruire la jeune fille qu’elle était alors…celle qu’elle avait voulu oublier « depuis 20 ans, je note 58 dans mes projets de livre, c’est le texte toujours manquant. »
Notre filiation donne à voir une certaine ressemblance, révélant une complicité naturelle, évoquant peut-être une transmission possible, mais surtout, elle instaure une distance : celle de l’âge, du temps écoulé « explorer le gouffre entre l’effarante réalité de ce qui arrive au moment où ça arrive, et l’étrange réalité que revêt, des années après ce qui est arrivé. » La scénographie composée de paravents transparents, laisseront apparaître tour à tour, les deux interprètes, éclairant l’une ou l’autre, reflets ou ombres… apparitions et disparitions…
Faire de Mémoire de fille, un spectacle, et le donner à entendre, c’est, en définitive, comme le dit Annie Ernaux, la démonstration édifiante, « que ce qui compte, ce n’est pas ce qui arrive, c’est ce qu’on fait de ce qui arrive ».

Mise à jour le 16/10/2024

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