Voyage dans l'histoire du street-art avec Jef Aérosol
Sélection
Mise à jour le 26/09/2022
Sommaire
Boots dandy, foulard bordeaux élégamment noué autour du cou, chapeau et ceinture rock’n’roll, Jef Aérosol, artiste incontesté de l’art urbain, nous accueille face à la BnF, où une exposition anniversaire intitulée « Jef Aérosol 40 ans de pochoir » lui rend hommage.
Rencontrer Jef Aérosol, ce n’est pas rien. Déjà, parce qu’il
est l’exemple de l’artiste accompli, et qu’on a toujours un peu le trac d’approcher
une pointure pareille. Mais quand on arrive sur les lieux de sa nouvelle exposition, on se sent à l’aise. Des locaux bruts de béton exposent 40 années de pochoirs sur plus de 600 mètres carrés.
Dès l’entrée, la reproduction de
la fresque « Chuuuttt !!! », dont l’originale, réalisée sur une façade
d’une quinzaine de mètres de haut jouxte la fontaine Stravinsky à Beaubourg,
nous met dans l’ambiance. Pour les besoins de l’exposition, Jef a refait le
pochoir. Il l’a réduit et inversé pour l’adapter au sens de lecture de la
visite. Une exposition sur mesure, conçue et imaginée par l’artiste et la
galerie Mathgoth, spécialisée dans l’art urbain.
Musicien, pochoiriste, aquarelliste,
ancien prof d’anglais, Jef est tout ça. Artiste, certes, mais humain,
profondément humain, accessible et généreux ! Tout comme l’équipe dont il
s’est entouré, et qui a travaillé tout l’été au montage de cette exposition : plus de 180 figures de son œuvre y sont représentées sur deux
espaces, sans compter les multiples tableaux et pochoirs originaux, dont on
peut aussi faire l’acquisition.
Une exposition à l’image d’un artiste hors norme, qui s’est
affirmé comme tel en quatre décennies. De son premier pochoir réalisé à l’automne 82 à l’âge de 25 ans, à des créations plus récentes, pochoirs et aquarelles
défilent sous nos yeux dans les quatre espaces dédiés aux thèmes de prédilection de l’artiste. On découvre sa vie et son travail suivant une chronologie bien
établie : autoportraits, enfance, musique, paysages urbains. La plupart des
œuvres sont réalisées en 2022 avec des pochoirs anciens, utilisés depuis 40 ans.
« La vie est comme un film, une suite d’images… »
40 ans de carrière et de pochoirs
Attiré par le dessin, la peinture, les images et la musique
dès l’enfance, Jef touche très vite à tout. Rock’n’roll, psychédélisme, pop art… Les années 1960, celles de son enfance, marquent la naissance des grands
mouvements artistiques du XXe siècle.
Une décennie qui l'a profondément marqué : « J’étais môme à
une période où une certaine classe d’âge, l’adolescence, a eu son mot à dire (…)
les premiers mouvements de jeunesse ce sont les années 1950 avec les teddy boys
puis les grands festivals, dans les années 1960. » Et Jef nous avoue son amour pour
The Clash, le groupe punk par excellence : « Les premiers
pochoirs que j’ai vus c’était ceux qui étaient sur les tee-shirts du groupe (…) Je les ai vus en 1981 au théâtre Mogador, à Paris. Futura 2000 peignait sur une
grande toile sur scène : c’était la première fois que je voyais un mec
peindre avec des bombes aérosol ; je n’avais jamais vu ça… »
Et c’est dans l’effervescence des années 1980 que la
carrière de Jef Aérosol décolle, sur le modèle de celle d’un Speedy Graphito ou d’un
Jérôme Mesnager. Puis les années 1990, qui ont été les années hip-hop, rap,
graff, tags ont relégué les pochoiristes au second plan… Avant que les années 2000 et l’avènement de street-artistes comme Banksy ou Shepard Fairey, alias
Obey aux États-Unis, ne saluent leur retour sur le devant de la scène et fassent de Jef Aérosol, Miss-Tic
ou Blek le Rat des « précurseurs ». C’est à ce moment-là, aussi, que les galeries les sollicitent et
que le street-art, d’art de rue, se fait art urbain et s’expose dans des lieux
autorisés.
Trois questions à l'artiste
Le pochoir, ça marche comment ?
Le pochoir, c’est une feuille en carton découpée puis posée
sur une feuille (blanche, noire ou un mur) sur laquelle on met de la bombe ou
de la peinture au travers et dont on va obtenir le négatif. « Un peu sur
le modèle de ce que font les gosses à l’école… ou quand on fait des gâteaux, qu'on utilise un
emporte-pièce avec un trou au milieu. »
D’abord utilisé à des fins de signalétique (travaux, trains,
palissades), le pochoir, qui permet de reproduire des signes en un grand nombre
d’exemplaires, s’est répandu dans l’art en se sophistiquant dans les années 2000. Le passage de la photocopieuse à l’encre (toner) à l’ordinateur, a permis
le passage du noir et blanc aux dégradés de couleurs et aux jeux de lumière ; la
réalisation d’images plus réalistes aussi.
Pourquoi avoir choisi la bombe plutôt que le pinceau ?
La bombe aérosol (qui s’inscrit dans la lignée de l’aérographe)
a été le premier et seul
outil qui permet de peindre en ne touchant pas le support, ce qui a
singulièrement modifié les habitudes : on pouvait peindre à la verticale sur
tous les supports… ça, et le pochoir, nous permettaient de peindre vite ! On
pouvait dès lors le faire dans l’espace public, on était plus limité à l’atelier…
Et la musique dans tout ça ?
J’ai toujours fait de
la musique. Il n’y aurait pas de peinture sans musique. La musique est
partout, elle est tout autour de nous. J’aime les musiques de l’âme, les
musiques de transmission orale, celles qui ne sont pas écrites. L’homme a toujours
été musicien : de la peau d’animale tendue à de l’air dans un roseau, il a
toujours compris qu’il pouvait générer des sons. Cette musique-là se
transmet depuis toujours et n'est pas écrite. En ce sens, ce qui m’intéresse ce sont les
musiques traditionnelles comme la musique irlandaise, mais aussi le blues,
le flamenco et le rock’n’roll, qui vont puiser dans l’histoire des peuples. Le
seul instrument qui vaille c’est l’âme.
Jef Aérosol, 40 ans de pochoirs
Exposition Jef Aérosol - 147, Avenue de France , Paris 13e
Du samedi 24 septembre 2022 au samedi 05 novembre 2022
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